mardi 3 janvier 2012

De M. Henri Konan Bédié, que retiendront les Ivoiriens ?

Tous les ivoiriens sont unanimes pour reconnaître que les malheurs de leur pays ont commencé après de coup d’état militaro fasciste du général Robert Guéi et sa soldatesque, du vendredi 24 décembre 1999.

De nombreux ivoiriens se posent aujourd’hui encore des questions qui sont restés sans réponses, à savoir : Quels sont les responsabilités du président Bédié et de son parti, le PDCI-RDA, dans le succès opérationnel du putsch de Noël 1999 ? Le PDCI-RDA et sont chef, n’ont-t-ils pas par négligence, par manque d’observation et d’humilité politique favorisé le coup d’état ? Le parti et son président ont-ils réellement tiré les leçons de cet épisode tragique de notre histoire commune au cours de laquelle les Ivoiriens ont goûté, eux aussi, à ce fruit amer qu’est l’avènement d’un gouvernement de facto, c’est-à dire qui n’a aucune légitimité, il n’a été élu par personne, même pas par les chiens du pays, qui règne par la force du fusil et l’argument de la force ? En Amérique Latine, Le général Augusto José Ramon Pinochet, et la junte chilienne furent un exemple sanglant dans ce sens en Amérique latine.

Au commencement était la discorde

L’histoire de la vie politique chez nous comme sous d’autres cieux, nous enseigne que les querelles de personnes et de leaderships sont les pires ennemis d’une formation politique. C’est pourquoi diriger un parti, c’est aussi savoir arbitrer la diversité des tendances à l’intérieur du parti, la recherche permanente d’un minimum de consensus sur les grands problèmes de société sans humilier ou ostraciser les minoritaires d’un jour.

C’est aussi pour nous en Côte d’Ivoire, apprendre à se défaire des opinions définitives et des oppositions tranchées ; à faire l’apprentissage de la diversité et de la tolérance, de la nuance et du compromis sur quelques valeurs essentielles entre ivoiriens ; à vivre en respectant les différences, en acceptant les divergences, en recherchant le consensus sur les équilibres du vivre ensemble et en s’accommodant pour le reste de vérités contraires, d’incertitudes partagées, de majorités et de minorités provisoires, de victoire partielles et de défaites surmontables.

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Nous vous donnons ici un exemple concret : après le retour du Général de Gaulle au pouvoir en 1958, il proposa deux ministères au Rassemblement démocratique africain dans le gouvernement français, Houphouët-Boigny le président du RDA devait occuper un ministère, le second devait revenir soit au Guinéen Sékou Touré ou au malien Modibo Keïta.

Houphouët-Boigny, tranchât en son temps pour un seul ministère afin d’éviter l’éclatement du RDA, car le seul ministère restant était convoité par deux tendances, qui s’ils n’avaient pas satisfaction, pouvaient durablement affaiblir ce grand parti émancipateur. C’est cela le réalisme politique et la gestion des hommes pour le triomphe de la cause commune.

La désillusion de tous ceux qui observent la vie politique ivoirienne, fut immense lorsqu’à la mort du président Houphouët-Boigny, officiellement le 7 décembre 1993, le bureau politique du PDCI-RDA, l’instance de direction du parti dans lequel siégeaient des hommes et des femmes de valeur, ne fut pas capable de réunir un consensus minimal autour des dispositions constitutionnelles pour une transition en douceur au sommet de l’Etat. La rupture de l’unité du PDCI fut le constat de tous les Ivoiriens, le jour du décès du premier président de la Côte d’Ivoire indépendante.

Des institutions qui n’ont pas su être au rendez-vous de l’histoire. Les ambitions des uns et des autres, les querelles de préséance, les amertumes, les frustrations des uns et des autres, la tribalisation ou l’ethnicisation du débat politique, une armée divisée, tout cela dans un environnement sous-régional comprenant des pays voisins qui rêvaient, depuis des années, d’être les spectateurs de notre propre noyade.

Voilà ce que Bédié avait choisi comme chemin au sommet de l’Etat ivoirien devenu « ivoiritaire », dont les « clubs CNB », « Cercle national Bédié » et autres en étaient la meilleure illustration.

C’est dans cette ambiance délétère et nauséabonde que le successeur de Félix Houphouët-Boigny est allé s’autoproclamer sur les antennes de télévision comme nouveau chef d’état de la Côte d’Ivoire. Sincèrement, n’y avait-il pas d’autres moyens que cette entrée dans l’histoire par la petite porte pour un parti qui a conduit le pays à l’indépendance ?

Incroyable ironie dont seule la grande hache de l’histoire a le secret, c’est par la télévision qu’Henri Konan Bédié, fut déchu de la fonction présidentielle. Habitué à la vie facile, aux côtelettes d’agneaux, aux vins rouge du bordelais, aux gros cigares et au champagne rosé, la seule réaction naturelle qu’il a eue, fut d’aller se cacher, la queue entre les jambes, comme un chien apeuré, chez l’Ambassadeur de France pour demander aux Ivoiriens de « résister » face aux putschistes.

Incroyable ironie de l’histoire, même les clubs de soutien et les adeptes du « bédiéisme » triomphant, avaient disparu de la circulation. Soyons sérieux, la conduite des affaires d’un pays ne peut se réduire à la revendication d’un héritage. La Côte d’Ivoire n’est pas une république Akan.

Tous ceux qui suivent le président Bédié sur cette base doivent se réveiller et se dire que l’ethnie comme refuge a fait les preuves de son inefficacité et de sa pauvreté à conduire le bonheur commun notamment au Rwanda avec le Hutu Habyarimana, au Zaïre avec le Ngandi Joseph Désiré Mobutu, au Liberia avec le Khran Samuel Kanyon Doe, au Togo avec l’entreprise Kabyè des Gnassingbé Eyadema et fils, etc. Ne pas le comprendre, c’est aller dans la bonne direction pour célébrer un grand mariage avec le fiasco.

Comment un parti qui a conduit la lutte d’indépendance et diriger le pays pendant 32 ans, a-t-il été aussi incohérent et inconséquent à un moment aussi important de la vie nationale ? Telle est la première énigme que le PDCI-RDA doit résoudre, pour comprendre qu’il avait lui-même, de facto, créé de toute pièce les germes du Coup d’état de Noël 1999.
(A suivre)


Dr Serge Nicolas Nzi.

Paru dans Le Filament N°17

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