mardi 29 juin 2010

Le code noir de Louis XIV

Genre : théâtre
Auteur : Léandre Sahiri

Editions Menaibuc, Paris, 2008
ISBN : 978-2-35349-038-7

« Le Code noir de Louis XIV » est une pièce de théâtre qui, une fois de plus, démontre la « versatilité » littéraire de l’auteur de « Monica ou de l’injustice de la justice ». Les œuvres de cet écrivain englobent tous les genres, à l’exception du cinéma qu’il promet de couvrir instamment, dans un avenir proche.
Revenant à l’œuvre du jour, il faut dire que Léandre Sahiri a transformé, avec un génie dont il a seul le secret, un document juridique historique en une pièce de théâtre incontournable. Ce document juridique historique, c’est Le Code Noir qui, en 1685, décida du sort des Noirs, depuis Louis XIV jusqu'à nos jours. L’intérêt de cette pièce de théâtre, c’est que, après lecture, elle ne laisse pas indifférent. L’auteur amène le lecteur à voir le monde autrement. En d’autres termes, l’œuvre transforme le lecteur totalement, agit sur sa conscience, lui ouvre les yeux et l’esprit. Au point de croire que c’est un coup de fouet que Léandre Sahiri donne pour éveiller les consciences. C’est pourquoi nous estimons que cette pièce de théâtre doit être enseignée dans toutes les écoles, les universités et institutions. Tout Noir voulant se libérer doit absolument connaître, posséder et lire « Le Code noir de Louis XIV » de Léandre Sahiri. Tel est notre avis.

Concernant l’auteur, il faut dire que Léandre Sahiri, fondateur et Directeur de publication du journal « Le Filament », est titulaire d’un Doctorat ès lettres de l’Université de la Sorbonne (Paris). Professeur de littérature, il a enseigné dans plusieurs établissements en France, en Côte d’Ivoire et au Canada où il a été enseignant-chercheur à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Critique littéraire et écrivain, il est intéressé spécifiquement par la promotion des valeurs humaines, les relations et Interactions multiculturelles. Il a collaboré à de nombreux journaux, magazines et revues et publié plusieurs livres dont La victoire par la voie des urnes (essai) ; Contes d'actualité (recueil de contes) ; Les obsèques de Bahi Oromé (théâtre) ; Le Code noir de Louis XIV, (théâtre) ; Jonathan Livingston le goéland (roman traduit de l'anglais) ; Monica ou De l'injustice de la justice (roman) ; Accusations (poèmes), etc.
Sylvain de Bogou


Quelques avis sur « Le Code noir»

Viviane Gnakalé Agnero :
Lorsque j’ai découvert le Code noir, j’ai été profondément choquée et révoltée. Beaucoup des nôtres ignorent tout de ce qui est le « code noir » et ont besoin d’en être instruits. Si bien que le projet d’écriture et de publication sur ce sujet est une initiative louable et très prometteuse.
En ce qui me concerne, j’ai découvert l’existence du « code noir » pendant des recherches que j’effectuais, il y a quelques temps déjà. Comme bien d’autres, j’en ai été profondément choquée et révoltée. Ce que je sais sur le sujet et que les lecteurs et lectrices vont découvrir à leur tour, je peux le résumer ainsi. Son origine : Louis XIV ; son auteur : Colbert ; son objectif : le besoin pour ses concepteurs d’accroître leur hégémonie culturelle et surtout leur puissance politique et commerciale. Pour ma part, ce document est un témoignage indéniable pour l’histoire, il doit surtout servir de garde-fou pour des nostalgiques de cette triste période ou pour confondre les tenants du néocolonialisme (qui n’est rien d’autre que la forme évoluée de l’esclavagisme), dans leur sombre dessein de répéter l’histoire.
Mais, permettez-moi de partager avec les lecteurs et lectrices, ce que je pense, d’une façon générale, de la question de l’esclavage. Dans cet ordre d’idées, voici un fragment d’un texte que j’ai rédigé dans la perspective d’un ouvrage à venir sur l’esclavage, un sujet sur lequel il y a encore beaucoup à dire.

« Au fond, qu’est ce que l’esclavage ? ».
Ce qui motive l’esclavage est la même tare qui justifie aux yeux de certains de nos frères les théories et conflits tribaux, a savoir, une certaine « déficience » morale, ou l’inachèvement de la de la maturation spirituelle, aggravé par un excès de vanité et d’ignorance.
Ce que nous devons comprendre c’est que dans l’absolu, la tare discriminatoire n’est, au fond, ni raciale ni ethnique, mais gravement et profondément humaine. Ce qui pousse l’homme à réduire son prochain à la servitude, n’est finalement rien d’autre que cette insurmontable soif de la domination. L’incommensurable besoin de se sentir supérieur à l’autre. « Le code noir » introduit par Louis XIV (16ème siècle) et plus tard repris par de nombreuses nations esclavagistes (à l’image des Jim Crow Laws aux Etats-Unis, 19ème siècle) participa de cette logique d’une quête de suprématie culturelle et commerciale. Si donc le noir a été, depuis des siècles, victimes de l’asservissement de la quasi-totalité des races humaines, y compris de la sienne, ce n’est pas à cause de sa faiblesse physique et encore moins de sa prétendue « infériorité mentale » qui, aux yeux du blanc suffit à justifier l’esclavage… mais, c’est bel et bien à cause de sa vulnérabilité économique et politique...
Je pense, sincèrement que, pour l’heure, il est dérisoire, pour nous, de nous accrocher à une vaine et hypothétique reconnaissance par les Blancs de leurs crimes esclavagistes. S’ils le font un jour, ce ne sera pas parce que, enfin, ils auront compris et reconnu leurs horreurs et erreurs, et toute l’étendue de leur responsabilité, mais pour le politiquement correct du moment. Et, ce politiquement correct, il ne s’imposera à eux que lorsque nous nous serons donnés les moyens intellectuels, économiques et politiques de les forcer s’incliner. En attendant, le verdict qui nous blanchira du crime d’être noirs, donc inférieurs et par conséquent domesticables, ne viendra de nulle part, sinon de nous-mêmes.
La connaissance, l’élévation spirituelle, le pouvoir économique, l’autonomie politique, c’est là que résident les clefs du salut qui nous absoudra du « délit de la négritude » !
Quand enfin, nous nous seront affranchis, libérés de ce que nous croyons et reconnaissons implicitement être « la malédiction de Cham », alors c’est tout naturellement que nous forcerons le regard des Blancs sur nous, à changer. En d’autres termes, c’est essentiellement lorsque nous serons libérés du complexe d’infériorité qui nourrit leur prétention à la domination, que nous gagnerons et notre respect mutuel et celui des Blancs ».


(Viviane Gnakalé Agnero est auteur de « Crise ivoirienne : se projeter au-delà des présidentielles » et de « Laurent Gbagbo, Pour l'avenir de la Côte d'Ivoire », aux Editions L’Harmattan).


Brehima Samaké :
Je suis un jeune Africain de l'Ouest, précisément du Mali. « Le Code noir », je ne veux pas trop en parler pour laisser les gens découvrir par eux-mêmes, comme moi, et en juger sans influence. Je voudrais toutefois préciser que, inséré en 1886 dans la constitution française, « Le Code noir » constitue un thème brûlant qui doit intéresser tout Africain qui a de la dignité, de la personnalité


Elie Liazéré :
« Un livre qui a l’avantage d’être écrit dans un langage de très bon niveau et d’expliquer plus clairement ce qui, dans le Code Noir, paraît implicite et inaccessible à tous... ». (Extrait de la préface).

Louis Sala Molins :
« Il me semble qu'exhumer le Code Noir, […] c'est extrêmement urgent... pédagogiquement urgent... ». ( Interview, Nantes le 14/04/1993).

André Castaldo :
« Le Code Noir permet d’apprendre beaucoup sur l’esclavage. ». (Extrait de « De l’esclavage à l’abolition, éd. Dalloz, 2006).

Révérend Pasteur Ti :
« Le Code noir de Louis XIV » de Léandre Sahiri nous apprend d’où et comment sont nés le mépris, le rejet et la soumission dont les Noirs ont été et sont victimes jusqu'à ce jour. Ce livre nous démontre comment et pourquoi les propos et les arguments qui soutiennent l’esclavage sont, à maints égards, faux, mensongers, et arbitraires… Il rétablit, en quelque sorte, la vérité. Car, c’est la connaissance de la vérité qui, seule, nous affranchira et affranchira les générations à venir, afin de traiter d’égal a égal avec leurs partenaires du monde entier. Il nous revient à nous tous et toutes de faire une large diffusion du contenu de ce livre, pour que nos enfants, nos petits-enfants le lisent et se débarrassent du complexe d’infériorité et de pauvreté qui nous ont été inculqué. Nous avons nos expériences. Nous avons nos jugements. Nous avons nos mots à dire. Ne restons pas amorphes. Ne soyons pas complices, ni consentants, en nous plaignant sans réagir. Agissons pour que la soumission et l’esclavage s’arrêtent. Le temps est arrivé. Dieu a ouvert les portes fermées. Ensemble, nous pouvons renverser la muraille. Oui, nous le pouvons. « Yes we can ! ». ( Extrait de « A propos des mensonges monstrueux sur le prétendu esclavage permanent des Noirs », Editions Menaibuc).
Un article paru dans la rubrique livre à lire du Filament N°5

jeudi 24 juin 2010

Les dirigeants africains : responsables ou irresponsables?

Il faut, pour rappel, dire que, depuis le 20 Avril 2010, suite à l’explosion accidentelle sur une plate-forme pétrolière de la compagnie BP (British Petroleum), des tonnes de matières pétrolières sont déversées sur les côtes américaines de la Louisiane. Ce sont environs 15,9 millions de litres de pétrole qui fuient quotidiennement dans le Golfe du Mexique. Cette situation a provoqué une grave catastrophe écologique qui a entrainé de nombreuses pertes de vies humaines au sein des populations locales, en plus des 9 travailleurs de la compagnie BP ayant péri dans l’accident.

La responsabilité de M. Barack Obama face à la catastrophe qui frappe son pays

Sans délai et sans détour, M. Barack Obama a affirmé, en des termes prompts, vigoureux et forts que BP devra payer, dans sa totalité, pour les travaux de nettoyages des côtes, ainsi que pour les dommages causés par l’accident. Et, comme si cela ne suffisait pas, les responsables de BP devront répondre à une série d’interrogatoires devant le Congres américain, non seulement pour fournir des détails sur les conditions de travail et de sécurité en vigueur au moment de la catastrophe, mais aussi et surtout pour situer les responsabilités des uns et des autres dans l’accident.
Il est donc très certain que, à la fin de la procédure d’explication entamée par le Congrès, non seulement l’ardoise à payer par BP risque d’être très lourde, mais très certainement de nombreuses têtes dans l’élite dirigeante de BP tomberont. Le président des Etats-Unis d’Amérique, M. Barack Obama n’est pas passé par quatre chemins pour sommer la compagnie pétrolière BP (British Petroleum) à payer la totalité des frais pour le nettoyage, pour les dégâts d’ordre écologique, pour indemniser les gens qui ont perdu leurs commerces et autres biens personnels, ainsi que pour d’éventuelles intoxications de personnes dans l’écoulement de la plate-forme pétrolière aux larges des Etats-Unis dans le golf du Mexique.
Le journal français Le Figaro, dans sa livraison en ligne du 4 Mai 2010, rapporte clairement les propos du président des Etats-Unis en ces termes : « Que les choses soient bien claires : BP est responsable de cette fuite. BP paiera ».
Le 1er Mai 2010, Paris Match, un autre journal français, a fait, quant à lui, écho des sentiments du président Obama face à la catastrophe qui frappe son pays, en ces thèmes : « M. Barack Obama semble avoir compris l’ampleur du drame écologique qui se noue dans le sud de son pays. Le gouvernement américain intensifie ses efforts pour prévenir au maximum la catastrophe environnementale de la gigantesque marée noire qui a atteint les côtes de la Louisiane, et menace la faune et la flore de cette réserve naturelle ».


Les dirigeants africains et la gestion des crises

Sous d’autres cieux par contre, la gestion des crises similaires, c’est le cas de le dire, se fait avec légèreté, amateurisme, inconscience et mépris vis-à-vis des populations et des victimes. Arrêtons-nous au cas singulier de la Côte d’Ivoire où, il n’y a pas si longtemps, nous avons vécu un scandale similaire, voire plus grave.
Rappelons, en effet, que c’est aux environs du 19 août 2006 que les populations de la capitale ivoirienne (Abidjan) se sont réveillées avec une puanteur inhabituelle. Ce qui, pour certains, devrait passer pour une mauvaise odeur, comme la ville en connaît depuis quelques temps déjà, va hélas ! se révéler être un des plus gros scandales de l’histoire de ce pays. Scandale orchestré, planifié et mis en exécution par des individus de mauvais acabit, internes et externes à la Côte d’Ivoire. Leur plan diabolique ayant réussi, ce fut plutôt aux populations locales d’en payer le prix fort. En effet, 528 tonnes de déchets hautement toxiques venaient d’être déversées dans les décharges publiques, à plusieurs endroits à Abidjan et sa banlieue. Résultat : les hôpitaux ont enregistré des milliers de consultations, suite à l’intoxication des populations. On a déploré même des morts d’hommes, de femmes et d’enfants, sans parler des effets pervers sur l’écologie des zones concernées, pour de nombreuses années à venir…

Ici, où l’acte ignoble du déversement des déchets toxiques sur le territoire ivoirien fut délibéré et savamment orchestré par des actions concertées d’une cohorte d’individus avides de gain facile, c’est aussi le cas de le dire, l’on a observé un mutisme total de la part de la classe dirigeante ivoirienne, hormis quelques réactions et actions de revendication, plus ou moins sporadiques de quelques personnes ayant perdu un ou des proches.
Et ce qui est pire, c’est que les nombreuses pertes de vies humaines et la gravité de l’acte ont été reléguées au second plan des préoccupations pour faire place au protectionnisme d’intérêt politicien malpropre. En effet, en lieu et place d’actions concertées pour faire payer tous ceux et toutes celles qui, de près ou de loin, auraient contribué à la violation de la sécurité du territoire ivoirien, les dirigeants ivoiriens ont plutôt choisi de protéger leurs accointances politiques au détriment de l’intérêt général. Si tel n’était pas le cas, comment comprendre que les autorités ivoiriennes, y compris le président la république ivoirienne lui-même, n’aient pas pris, à-bras-le-corps, la gestion d’une telle affaire si sordide et si puante, pour la traiter comme il se devait, c'est-à-dire pour faire payer, au prix fort, toutes les personnes et institutions internes et externes, qui, d’une manière ou d’une autre, y sont impliquées. Comment comprendre que les autorités ivoiriennes n’aient pas pu être préoccupées ni du sort des populations qui les ont portées au pouvoir, ni de la violation de la souveraineté du territoire de la Côte d’Ivoire?

Pire ! Il est même apparu que les autorités ivoiriennes ont préféré la protection de certains agents de l’état et des autorités locales qui ont en charge la gestion de la ville d’Abidjan, notamment le Maire et son Conseil municipal, la Direction de la Douane, la Direction du Port d’Abidjan, la Direction de la Police frontalière et tous les services annexes, les Ministres de l’intérieur, de la sécurité, de la défense, etc.
De ces faits, il est difficile de ne pas admettre que, sans l’aval d’un certain nombre de personnalités influentes en Côte d’Ivoire, une seconde « opération » de déversement des déchets toxiques à Abidjan n’aurait eu aucun succès. Il est aussi tout à fait légitime de se demander si l’opération dont il est question n’était pas une activité lucrative courante de ces commanditaires dont la dernière livraison aurait mal tourné?
En tout cas, on est en droit, n’est-ce pas, de se demander finalement pour qui travaillent toutes ces autorités en Côte d’Ivoire ? Pour le peuple ou pour des intérêts occultes ? Reste à savoir...
Aux Etats-Unis, M. Barack Obama a réagi avec véhémence ; car, il est conscient que sa position actuelle, il la doit au peuple et que cette même position, il peut la perdre, aux élections à venir, si telle est la volonté de ce peuple-là. En est-il de même en Afrique, et singulièrement en Côte d’Ivoire? C’est moins sûr.

Des leçons à tirer

Aux Etats-Unis, BP doit payer et même payer très cher. Aux Etats-Unis, le président a parlé avec autorité et fermeté, de concert avec les élus du peuple qui siègent au Congres américain. Aux Etats-Unis, il a été décidé de passer au peigne fin les circonstances de l’accident et de situer les responsabilités des responsables de BP dans le désastre qui a coûté la vie à 9 travailleurs ; et, personne ne doute que des têtes, et non des moindres, risquent de tomber avant la clôture des auditions. Aux États-Unis, on dit tout simplement : « tenter, regretter ».
Par contre, en Côte d’ivoire, l’Assemblée Nationale, qui est, pourtant, l’émanation du peuple, est restée une grande muette. En Côte d’ivoire, la politique a eu raison sur la justice. En Côte d’ivoire, la souveraineté du pays a été bafouée et, comme si de rien n’était, les commanditaires de cet acte crapuleux continuent de circuler librement, tranquillement, aisément, dans l’inconscience et l’indifférence générales, comme si la vie d’un Africain ne vaut pas la peine d’être protégée, sécurisée, défendue, magnifiée, célébrée. En tout cas, ici en Côte d’ivoire, comme dans d’autres pays africains, le mal a été bel et bien fait, et on a dit : « ya fohi, on avance ».
N’est-il pas temps, grand temps, qu’on se réveille de ce long sommeil ?

Adjé Kouakou Producteur et Présentateur de l’émission AMANIEN. Voice of Africa Radio à Londres.

Un article paru dans la rubrique Amanien du Filament N°5




mercredi 23 juin 2010

APPEL AUX INTELLECTUELS ET CADRES DU FPI ET DE LA MOUVANCE « PATRIOTIQUE et REPUBLICAINE »

De notre avis, et de celui de nombreux autres observateurs, acteurs, analystes de la vie économique et sociopolitique, beaucoup d«’intellectuels » de grande dimension, reconnus comme tels, tant au FPI que dans le courant républicain et patriotique, ont, depuis le 19 Septembre 2002, abandonné la lutte, sur le plan des réactions, des argumentations, des mises au point, des anticipations, des défenses et des éclairages, etc. Quelles en sont les explications possibles ? Sont-ce les effets assommants et déroutants du 19 septembre ? Sont-ce les problèmes de personnalité, de ressources propres ou de valeur intrinsèque ?
La réponse est simple et se présente ainsi :
Certains d’entre nous, grisés et vautrés dans une richesse fulgurante, pour le moins inespérée, dans un bien-être et un bien-vivre plus qu’inattendus, ont maintenant des préoccupations autres, qui, malheureusement les entraînent dans l’insouciance, l’inconséquence, et l’irresponsabilité ; et alors, ils se désintéressent complètement des questions urgentes, vitales, cruciales, d’intérêt général.
Pour ces gens-là, le monde s’arrête à eux. Ils manquent de vision, aveuglés qu’ils sont par leurs nouveaux statuts ; Ils manquent d’humilité et de solidarité. Et, le vrai drame, c’est qu’ils n’ont plus du tout aucune conscience des dangers qui nous menacent tous. Y compris eux-mêmes… Ils ont abandonné la lutte et sont souvent complices de ceux qui détruisent la Côte d’Ivoire... Heureusement, la Côte d’Ivoire est encore debout et restera toujours debout, contre vents et marées, contre toutes les « complotites ». Dieu est le seul juste et le vrai juge, qui tient la Côte d’Ivoire et qui nous protège de tout et en tout instant.
Je lance cet appel aux intellectuels, aux cadres et leaders du FPI et de la mouvance patriotique et républicaine. Je les invite à se ressaisir. Et, le plus tôt sera le mieux.
VIVE LA CÔTE D’IVOIRE ! VIVE LAURENT GBAGBO ! VIVE L’AFRIQUE DIGNE ET LIBERÉE !
Par Lékadou Tagro Gérard, Un Ivoirien, Un Patriote, Un Panafricaniste.


Paru dans la rubrique libre propos du Filament N°5

Le Koutoukou les tue

Je suis allé dans mon village
Et j’ai vu des hommes
Des hommes blanc pale I
Je suis allé à Yobouakro
Et j’ai vu des hommes
Des hommes percale
[…]

Des hommes comme toi
Des hommes comme moi
Des hommes au teint délavé
Comme le sable lavé par l’eau qui ruisselle
Des hommes à peau de poulet
Le poulet plumé pour être rôti au four des riches.
Des hommes à la peau flasque et pale
Pale comme la lueur de la lampe-tempête
Des hommes à la peau lessivée
Lessivée comme du vieux « FANCI »* .
Des hommes naguère allègres
Des hommes naguère radieux
Aujourd’hui lessivés et usés
Aujourd’hui déteints.

Des hommes qui ne savent plus rire ni sourire
Des hommes qui mangent à peine une fois par jour
Pour éviter la mort par la faim
Pour éviter le rongement des soucis…

Mes frères boivent
Ils boivent cette boisson
Qui brûle la langue
Qui brûle la gorge
Qui brûle la panse
Qui empoisonne le sang!
Mes frères boivent
Ils boivent le koutoukou **
Ils boivent le « KTK »
Ils boivent le « sauté tombé »
Ils boivent le « tou-kpin-tchré »
Ils boivent le « petit-moins-cher »
Ils boivent tôt le matin
Ils boivent tous les matins
Ils boivent toute la matinée

En une gorgée chaude
Les boyaux se tordent
Et la faim est vaincue
Et le souci est vaincu

C’est ainsi
Tous les jours
Qu’ils croient éloigner la mort
La mort qui rit dans leurs yeux.

Regardez ces hommes, ces femmes, ces gosses
A cheveux blanchis précoce
A ventres mous qui cachent des intestins et les foies grillés.

Regardez-les bien, ces morts en sursis
Ce sont eux qui cultivent le riz d’Issia
Ce sont eux qui sèment l’igname de
Ce sont eux qui plantent la banane d’Aboisso

Regardez-les bien, ces cadavres ambulants
Ce sont eux les fournisseurs des chocolatiers de Paris
Ce sont eux les producteurs des café-dollars de Londres
Ce sont eux les faiseurs de fortunes
Et pourtant les voici ruinés et usés
Et pourtant les voici lessivés et déteints

Seul le koutoukou, leur compagnon de toujours,
Leur sert
Dans le « petit-verre-moins-cher »
Le sommeil et la survie.

Mais ces hommes, vos semblables
Que vous réduisez à vous torcher,
A vous servir,
A vous engraisser!
A vous applaudir
A applaudir vos mariages
A applaudir vos gaspillages!
Ces hommes, vos semblables,
Que vous tuez à petit feu
Au feu consumant de la mélancolie et de l’alcool
Ces hommes, vos semblables
Qui meurent dans l’indifférence, votre indifférence
Quand ils comprendront que…

Jean Améa (Extrait de Cris séditieux, à paraitre)

[*] Fanci : pagne populaire de qualité et de prix modestes, caractérisé par la perte souvent précoce de la couleur dont ii est imprégné ou imprimé.

[**] Le koutoukou (ou apéteci en langue Agni, est de la Côte d’Ivoire) désigne une boisson locale, à très forte dose d’alcool. Le Koutoukou peut, selon les circonstances, les régions ou les localités, s’appeler : KTK, sauté-tombé, toukpin-tchré , petit moins cher, etc. C’est la boisson prisée des pauvres.


Paru dans la rubrique Poésie du Filament N°5

L’impôt de capitation dans les colonies françaises d’Afrique

Après la conquête, l'autorité coloniale élabora un vaste programme d'exploitation et de mise en valeur des colonies. Ce programme suivait, cependant une logique particulière qui plaça, en première ligne, les intérêts économiques, politiques et sociaux des colonisateurs. L'idéal, pour ces derniers, était d'exploiter et accaparer, avec le minimum de charges financières, sinon gratuitement, toutes les ressources des colonies. Rappelons-le, l'assujettissement maintient les colonies dans la subordination étroite à la métropole qui les exploite à son profit, et, sans tenir compte de leurs aspirations, qui leur imposent le régime le plus conforme à ses intérêts. C'est pourquoi les colonies ne devaient rien coûter à la métropole.

Au nom de ce principe, le pouvoir colonial institua l'impôt de capitation – c'est-à-dire par tête- ou l'impôt personnel, qui était une forme de contribution obligatoire que les peuples colonisés devaient verser au colonisateur, pour assurer le financement de leur domination. Etabli au Sénégal pour la première fois par décret impérial du 4 août 1860, promulgué le 5 août 1861, l'impôt personnel constitua un précieux outil devant permettre la réalisation de l'ambitieux programme de mise en valeur que la France avait entrepris dans son empire colonial. L’établissement de l'impôt de capitation rejoignait l'axiome fondamental de la doctrine coloniale française en matière financière : « dominer, exploiter, mais à moindre coût ».
Cette conception des rapports économiques de la France avec ses colonies africaines fut dévoilée au grand jour, à partir de 1892, avec la mise en place des budgets locaux des colonies qui furent alimentés par le produit des redevances, impôts ou contributions que les conventions passées avec les chefs permettaient de percevoir. Par ces mesures, les colonies devaient assurer tous les moyens financiers, matériels et humains pour la mise en place de l'infrastructure coloniale.
Cette vision des finances coloniales atteint son paroxysme avec la loi de finances du 13 avril 1900, au terme de laquelle les colonies devaient désormais assurer par leurs propres moyens et leurs revenus intrinsèques, le financement total de leur outillage économique et infrastructurel, que l'exploitation de leurs ressources et leur mise en valeur allaient inéluctablement entraîner. Cette loi, intéressante pour notre étude, surtout en son article 33, consacra le principe de l'autonomie financière des colonies. Chaque région devait ainsi mobiliser ses ressources pour participer aux objectifs du colonisateur. Ce dernier supprima les subventions jusque-là accordées aux colonies dans leur budget. Dans cette logique, la colonie apparaît comme une entité devant répondre, au mieux et en tout temps, à sa vocation de support financier de la métropole, quel qu'en soit le coût social pour les indigènes.
Ainsi donc, l'impôt, qu'il soit sous forme de capitation ou de taxes indirectes ou de prestations, dont le travail forcé, constituait un précieux instrument d'exploitation et de domination au service de la cause coloniale.

Cheikh DIOUF (Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Extrait de « Fiscalité et Domination Coloniale: l'exemple du Sine: 1859-1940 ». Source : Mémoire Online).

Paru dans la rubrique Droit de savoir, devoir de mémoire du Filament N°5



mardi 22 juin 2010

Les Africains sont-ils solidaires ?

Le fait que l'Afrique soit le berceau de l'humanité a renforcé cette idée maternelle et généreuse qui confère à l'Afrique, la terre de la solidarité. Ainsi, contrairement à l'occidental, qui dit-on, possède a priori une culture individualiste, l'Africain est guidé par l'idée suivante : « quand y en a pour un, c'est que y en a pour tous ». Cependant, de la sphère sociale et politique, en passant par l'aspect économique, l'Afrique aujourd'hui semble s’éloigner des valeurs de solidarité. Les inégalités sont énormes, la pauvreté s’accentue… L’indifférence est quasi glaciale. Alors, cette solidarité africaine est-elle un mythe ou une réalité ? Autrement dit, les africains sont-ils vraiment solidaires les uns des autres ?
Lorsqu’on la dépouille de toute considération émotionnelle, cette question dévoile une réalité de notre vie sociale moderne qu’il faut analyser, avec sérieux et méthode, en termes de critiques objectives et honnêtes, et en se gardant de toute méprise.

La solidarité est-elle, en réalité, une vertu africaine ?

Je dirai d’emblée que c’est à tort qu’on présente souvent la solidarité comme une vertu africaine, et qu’on considère l’individualisme comme un vice occidental. Si les pays occidentaux passent aujourd’hui pour être des terres d’individualisme, c’est avant tout parce qu’ils ont compris la nécessité d’organiser la chaîne de la solidarité à l’échelle nationale. Et ce, pour libérer les individus des soucis matériels de leurs parents et de leurs proches afin qu’ils travaillent à leur propre développement et à celui de leur pays.
C’est une tendance étatique qui amène les citoyens des pays occidentaux à se tourner vers l’Etat, organisateur de la solidarité, pour réclamer des aides dès qu’ils rencontrent une difficulté. Mais, on commet une lourde erreur à croire que la distension des relations interindividuelles en Occident est synonyme d’absence de solidarité. Toute personne qui y travaille contribue, par ses cotisations sociales, à la prise en charge des exclus et des fragiles de la société (chômeurs, malades, invalides, personnes âgées, etc.). Et, chaque salarié est soumis à ce mode de fonctionnement, parce que nul n’est à l’abri de l’exclusion ou d’une période de fragilité. Mais, en plus de la solidarité organisée à l’échelle nationale, la promptitude des Occidentaux à venir en aide à d’autres peuples dès qu’une catastrophe survient est révélatrice d’une culture de la solidarité qui n’a rien à envier à l’entraide mutuelle telle qu’elle se pratique en Afrique. Les guerres, les famines, les inondations et les épidémies, etc. offrent régulièrement l’occasion de prendre la mesure de la solidarité dont les pays occidentaux sont capables.

Envers et revers de la solidarité en Afrique

En Afrique, en revanche, l’entraide mutuelle supplée les carences des Etats, en matière de protection sociale. Plus on continuera d’ignorer cette réalité en Afrique, plus la culture du « tout parent » ou du « tout ami » s’enracinera, empêchant du même coup la libération indispensable des énergies individuelles en vue du développement du pays tout entier. Comment des citoyens pourraient-ils, en effet, investir et maîtriser leur compte financier s’ils n’ont pas d’allocations ou aides de l’Etat, s’ils doivent sans cesse répondre à des sollicitations diverses et aussi urgentes les unes que les autres ? Il est d’ailleurs significatif de constater que ceux qui s’en sortent, en Afrique, sont généralement critiqués pour leur supposée pingrerie.

Ce qu’on appelle communément «la solidarité africaine» est, au mieux, une entraide mutuelle qui s’exerce essentiellement dans le cadre des liens parentaux ou amicaux. Au pire, c’est une connivence mortifère qui a pour mot d’ordre : « A mort, ceux qui ne connaissent personne » C’est la raison pour laquelle les pouvoirs publics sous nos tropiques sont incapables de résoudre les problèmes d’intérêt national. Car, aussitôt nommés, leurs différents responsables font l’objet de sollicitations diverses de la part de parents proches ou éloignés, vrais ou supposés. Et, lorsqu’on n’a pas de lien de parenté permettant d’acquérir ou de sauvegarder quelque intérêt, on recourt à un réseau d’amitié de type très mafieux. Nous voilà de plain-pied dans la corruption qui gangrène notre administration !
A la vérité, on se doit de reconnaître que, les Africains n’ont pas plus le monopole de la solidarité que les autres peuples n’ont celui de l’individualisme. Brandir la solidarité comme une vertu typiquement africaine, c’est fermer les yeux sur la léthargie de nos Etats africains en matière de protection sociale.
Serge Grah
(Journaliste, Ambassadeur Universel pour la Paix).
serge_grah@yahoo.fr

Un article paru dans la rubrique sous l'art à palabre du Filament N°5



samedi 19 juin 2010

Les noirs ne lisent pas

« Les Noirs ne lisent pas », tel est le titre d’un article que j’ai reçu le mois dernier et qui serait un texte lu, un jour, par M. Dee Lee, sur les ondes d'une station de radio de New York. Je voudrais ici, afin de dire, comme d’habitude, ce que je pense, revenir sur cet article, qui est passé presque inaperçu et dont le titre et le contenu m’ont vivement interpelé.
D’après cet article donc, nous les Noirs, dans notre grande majorité, nous n’aimons pas lire, nous refusons de lire, nous ne prenons ni la peine, ni le temps de lire, même quand les livres parlent de nous ou sont spécifiquement adressés à nous.
D’après cet article, comme nous les Noirs, nous ne lisons pas, alors « la meilleure façon de cacher une information, voire un secret, à un Noir, c’est de mettre ça dans un livre ». N’est-ce pas vrai ?
En tout cas, toujours d’après cet article, comme nous les Noirs, nous ne lisons pas, alors, notre aptitude à comprendre et à discerner est moindre, c'est-à-dire très réduite et ne se développe pas ; et, de ce fait, nous sommes incapables de savoir que nous nous privons ainsi des moyens de nous émanciper, de nous épanouir, d’évoluer ; nous nous condamnons volontairement à demeurer des esclaves, de générations en générations, nous contribuons ainsi, volontiers, à perpétuer notre maintien dans l’esclavage permanent préconisé par Le Code Noir. En tout cas, en ne lisant pas, nous nous autodétruisons inconsciemment.
Toujours d’après cet article, du fait que, nous les Noirs, nous ne lisons pas, alors nous cultivons, à nos dépens, quatre vices fondamentaux, à savoir : l’ignorance, la violence, l’avidité, et l’égoïsme. Ces trois vices, dont nous n’avons bien souvent pas conscience, sont, de toute évidence, trois armes fortes et efficaces que nous utilisons contre nous-mêmes. Pourquoi et comment ? C’est ce que je vais m’évertuer à démontrer ou à expliquer, en commençant par l’ignorance.

De l’ignorance
Il faut savoir que l’ignorance, c’est le fait de manquer d’instruction, de savoir, de connaissances, parce qu’on ne veut pas lire, ou parce qu’on refuse de lire, ou parce qu’on ne sait pas lire, ou parce qu’on n’est pas instruit, etc. Ce défaut ou ce manque constitue la première arme par laquelle on maintient un être humain en esclavage. Parce que, en vérité, on ne peut manipuler, exploiter et dominer que des gens ignorants ; tout simplement parce que, n’étant pas instruit de certaines choses, l’individu ignorant est borné, c'est-à-dire il ou elle manque d’esprit critique et de discernement, il ou elle est réduit au seul état de consommateur, de pourvoyeur ou convoyeur, de bête de somme ou bête de guerre...
Voyez-vous, nous vivons actuellement à l'ère de la Technologie et l'Information. L'opportunité nous est donnée, à tous et à toutes, de lire n'importe quel livre, sur n'importe quel sujet, n'importe quand, et n'importe où. Mais, voilà que, nous les Noirs, nous refusons de lire, nous ne lisons pas. Partout, il y a d'innombrables livres disponibles et facilement disponibles, tant dans les bibliothèques que dans les librairies du monde entier, y compris sur e-book…, sans mentionner les éditions et librairies spécialisées pour Noirs et fournissant des ouvrages de grande valeur susceptibles de nous permettre d'atteindre un certain niveau intellectuel et moral. Mais, malgré tout ça, il y a que c’est très peu d'entre qui nous lisent de façon soutenue, parce que la plupart des Noirs n’aiment pas les livres, ne se préoccupent pas de lire, ne se donnent pas comme loisir la lecture. Oui ! Combien sont-ils, en vérité, ceux et celles d’entre nous qui vont en bibliothèques, ou qui achètent des livres, ou qui, à un anniversaire ou à un mariage, offrent des livres ? Très peu ! Très très peu ! Et, ces quelques-uns qui lisent, généralement, soit ils passent pour des demeurés, soit ils gardent les informations pour eux-mêmes et meurent, parfois dans la misère ou le chagrin, sans livrer les richesses et les savoirs qu’ils possèdent ; dans le meilleur des cas, au risque d’être vus comme des extraterrestres, certains s’attèlent à écrire, du moins écrivent. Et, quand ils ont eu écrit, soit ils ne trouvent pas d’éditeurs, soit leurs ouvrages ne sont ni achetés, ni connus, ni lus. Ceci dit, j’en viens maintenant au deuxième vice, la violence.

De la violence
Viscéralement lié à l’ignorance, la violence est définie, en termes simples et clairs, comme l’accroissement irréfléchi, l’abus ou le mauvais usage de la force dont la nature et Dieu nous ont dotés, les uns comme les autres. La violence, qu’elle soit physique ou verbale est un dérèglement, c'est-à-dire un mal qui fait perdre, à tout individu, ses moyens de contrôle, la maîtrise de soi. Et, je dis, ce que nous vivons et que beaucoup semblent ignorer, c’est que, en vérité, c’est le manque d’instruction et d’éducation qui conduit et condamne, irrémédiablement, à la violence, sous toutes ses formes. L’individu instruit ou éduqué est libre et fort. Il ou elle tire sa force ou sa puissance des connaissances et des savoirs acquis, lesquels lui permettent d’« adoucir ses mœurs », de tuer en soi-même ou dépasser les sentiments de frustration et les complexes, d’user d’arguments pour se défendre, de ne pas être complice de sa propre destruction et de la destruction des autres, de comprendre le monde et, ayant compris celui-ci, ne plus s’en sentir le jouet passif… C’est ce qu’exprime Platon, en ces termes : « la violence est le produit de l’ignorance… L’être humain qui sait, il sait ce qu’il fait et il n’agit pas contre ses intérêts, ni contre les intérêts des autres. L’être humain qui n’est pas ignorant n’est pas violent. Bien au contraire ». Platon nous explique, ainsi, l’origine et les causes des guerres fratricides, des génocides, des rebellions dans les pays africains ; ainsi que le pourquoi des vols, des viols, des vandalismes, des crimes et autres délits, qui ont cours et lieu dans les ghettos, les bidonvilles, les townships, les banlieues où la majorité des habitants sont des illettrés ou des demi-lettrés, ce que M. Nicolas Sarkozy appelle « la racaille ».
Tels sont donc, comme vous voyez, les faits et méfaits de l’ignorance et de la violence que, nous les Noirs, nous vivons et vivrons encore et toujours, tant que nous continuerons à refuser de lire, tant que nous prendrons toujours plaisir à rejeter la culture de l’esprit qui, comme le filament dans une ampoule, apporte la lumière dans la vie de tout individu. Venons-en maintenant à l’avidité.

De l’avidité
Selon le dictionnaire Larousse, l’avidité est une forme de violence qui consiste à désirer quelque chose ardemment, avec force, de façon immodérée et parfois insensée ou déraisonnée. C’est un sentiment naturel et bestial, mais dont on ne peut s’affranchir que par l’éducation ou l’instruction. Or, comme nous les Noirs, nous ne lisons pas, la plupart d’entre nous sont des gens avides ; et avides de quoi ? Eh bien, de choses futiles et inutiles. Puérilement. Je vais vous en donner les preuves. Vous savez, partout où nous nous trouvons dans le monde, nous travaillons dur et fort, à tous les niveaux, jusqu’aux plus sales boulots ; et partant, nous gagnons beaucoup d’argent, parfois nous avons de grosses sommes d'argent à notre disposition. Mais, qu’en faisons-nous ? Eh bien, nous payons de grosses factures de téléphone, les produits exotiques, les habits, les parures et autres objets de beauté. Pendant les périodes des fêtes de Noël et de fin d'année, pour les mariages et les funérailles, nous dépensons beaucoup trop d’argent à des fins inutiles, pour ne pas dire, nous gaspillons nos fortunes durement acquises. Au point que nous constituons un marché juteux pour quelques entreprises. Quels que soient les produits, nous consommons tout et n’importe quoi, par avidité, c'est-à-dire poussés et mus par le plaisir et surtout le désir ardent de toujours posséder. Nous voulons posséder, et toujours, et encore, et davantage, sans penser le moins du monde, ni à épargner pour nos vieux jours, ni pour nos progénitures, ni à investir pour les générations à venir. Par exemple, au lieu de démarrer une entreprise, nous penserons, d’emblée et de préférence, à des mariages pompeux, à des funérailles grandioses, à l’achat de nouvelles paires de chaussures et des vêtements qui coûtent très cher, rien que pour « frimer », c'est-à-dire pour paraître des gens pleins, alors que nous sommes vides. Certains et certaines d'entre nous vont jusqu'à négliger leurs propres familles pour se procurer les tout derniers designs ou modèles griffés... D’autres pensent que le fait de rouler en belles voitures, ou bien le fait de vivre dans une grande maison leur octroie un certain «statut» avéré ou donne la preuve palpable qu'ils ou elles ont réussi dans la vie, que leur rêve est réalisé. Ce qui est faux et fou, tant qu’ils demeureront, aux yeux des autres, des ignorants qui s’ignorent et qui s’illusionnent avec de bonnes apparences et la fière allure de femmes et d’hommes intelligents…
Quels que soient les lieux où nous habitons, en Europe, aux USA, en Afrique…, les Noirs sont tous les mêmes ! La majorité d’entre nous croupissent, avec ou sans famille, dans des conditions précaires, dans la misère, parfois sans le minimum vital ou en proie aux pires souffrances. Mais, notre avidité, qui va de pair avec notre égoïsme (je vais en parler plus loin) nous empêche de les aider, encore moins de nous mettre collectivement pour constituer un lobby financier afin de mener une meilleure vie en communauté.
Nous dépensons beaucoup d’argent pour des magazines People, des chaînes de télévision et de radio pour Noirs et d'autres medias du même genre qui nous apportent, à volonté et à foison, des images négatives et destructrices de nos propres images et de nos propres foyers. Ainsi, nous dilapidons d'immenses sommes d’argent au profit des grandes firmes, même lorsque leurs possesseurs nous insultent, comme le font certains, en déclarant qu'ils ne veulent pas d’« argent noir ». Et puis, vous savez combien nous dépensons d’argent dans les produits exotiques, dans les perruques et faux cheveux, dans les produits cosmétiques pour nous tanner la peau et exhiber ainsi, sans vergogne, aux yeux de tous, notre honte d’être noir et notre complexe d’infériorité vis-à-vis des autres peuples qui saisissent toutes ces opportunités pour perpétuer l’esclavage, innocenter leurs crimes, justifier leur soi-disant supériorité, et se construire une communauté plus forte et plus prospère, à partir des profits qu’ils réalisent de nous et sur nous.
Par ailleurs, du fait que nous ne lisons pas, eh bien, nous refusons de faire entrer dans nos vies la lumière ou la culture de l’esprit qui nous aiderait ou conduirait à extirper, de nos habitudes et de nos mentalités, les vices, dont l’avidité, qui nous incitent à, sans conscience, dévorer nos moissons, engloutir nos richesses acquises, non moins ardument, à la sueur de nos fronts. Pour finir, venons-en à l’égoïsme.

De l’égoïsme
Tout le monde le sait, l’égoïsme est, comme la violence, un sentiment tout à fait naturel et bestial. Sa spécificité est qu’il porte un individu à centrer tout sur soi, à n’aimer que soi, à juger tout par rapport à soi, à se préoccuper exclusivement de son propre plaisir et de son intérêt strictement personnel, sans se soucier de l’intérêt des autres. Pour l’égoïste « les autres, c’est l’enfer » (Sartre). L’égoïsme est une tendance qui va à l’encontre ou aux antipodes des sentiments nobles, tels que l’altruisme, la générosité, le désintéressement, l’amour, la morale et la solidarité…, lesquels sont le fruit de l’éducation et de l’instruction, et qui élèvent l’être humain au-dessus des contingences immédiates et le poussent à agir en être pensants. Et donc, l’égoïsme est un vice. Malheureusement, ce vice est enraciné en la plupart d’entre nous, sans savoir que c’est une puissante arme par laquelle l’esclavage des Noirs se perpétue sous des formes variées. L'un des nôtres, l’Américain William E. Dubois, le confirme dans son livre, Le Dixième des Talents, en le dénonçant et décriant comme étant le rhizome de « la désunion viscérale dans notre communauté ». Or, comme nous les Noirs, nous ne lisons pas, eh bien, fort malheureusement, la majorité d’entre nous, nous n'avons pas lu ce livre, nous n’avons pas bénéficié de la substantifique moelle de ce livre, et même que nous ignorons l’existence de ce livre, ainsi que le message que son auteur, notre frère de sang, nous adresse ; un message qui pourrait aider au moins 90% de Noirs sans instruction à accéder à une meilleure qualité de vie...
A cause de l’égoïsme, ceux d’entre nous qui ont réussi, grâce à l’école, à l’éducation et à l’argent, regardent, de haut, les leurs, je veux dire les autres Noirs ; ou bien ils aident ceux-ci avec condescendance, non comme par devoir humanitaire, ni par confraternité. C'est-à-dire qu’on aide sans vraiment aider. On est généreux sans vraiment l’être. On pense aux autres non sans penser à les spolier… Tout cela est le fait de l’égoïsme.
C’est aussi à cause de l’égoïsme que nous ne parlons jamais, d’une même voix, que nous ne construisons pas ensemble, que nous ne travaillons pas ensemble sur des projets pour atteindre des réalisations communes. C’est également à cause de l’égoïsme que nous ne réalisons pas des œuvres grandioses, telles que les autres en ont accomplies, que nous admirons, que nous envions, et dont nous profitons, etc. Même quand nous avons l’ambition d’entreprendre ensemble, et qu’il arrive de nous mettre ensemble, nous laissons nos egos individuels triompher, dominer nos objectifs communs. Par exemple, nos prétendues organisations d'aide et de charité, nos œuvres de bienfaisance, nos dons ou donations, nos parrainages (...) sont seulement destinés à promouvoir les noms de certaines personnes, sans apporter de réels changements au sein de nos communautés. C’est aussi par égoïsme que nous sommes heureux et fiers de siéger ou plastronner dans des conférences, des congrès, des conventions…, qui ont lieu dans les grandes cités, dans des hôtels prestigieux. En ces circonstances, nous discutons de tout et de rien, parfois avec méfiance et en langue de bois, et très peu ou très vaguement au sujet de ce que nous projetons de faire. Nous ne sommes souvent dans ces forums que pour jouer des rôles subalternes, que pour quérir des places d'honneur ou des titres, ou bien c’est pour servir de faire valoir, sinon nous faire valider comme les meilleurs orateurs ou les « Buppies » (les parvenus) de nos communautés, et non pas comme les meilleurs réalisateurs…

Prenons la résolution de lire
Au regard de tous ces faits, pouvons-nous envisager que, tôt ou tard, il y aura une fin à notre égoïsme, à notre violence, à notre avidité, à notre ignorance ?
Probablement non, tant que nous refuserons obstinément de lire, de nous instruire pour ouvrir nos esprits et sortir de ce que Kant appelle l’« état de tutelle », c'est-à-dire l’incapacité à nous servir de notre propre entendement, à penser de manière autonome. Probablement non, aussi longtemps que nous refuserons l’échange et le partager des informations, des connaissances, des savoirs, par la lecture. Probablement non, aussi longtemps que nous continuerons à penser que nous «aidons» nos communautés en les entrainant à enrichir les plus riches, à payer des cotisations à des organisations (financières, religieuses et autres, bien souvent fantoches, hypocritement philanthropiques et sournoisement à but non lucratif, qui ne font pas plus que tenir d'extravagantes conventions dans des hôtels de luxe, pour nous vendre des rêves et nous entretenir dans des illusions de prospérité et d’aisance.
Toutefois, je suis convaincu que nous pouvons nous en sortir, si et seulement si nous nous décidons, ici et commençons, ici et maintenant à lire, à prendre l’habitude et le plaisir de lire.
Comme vous voyez, par ce texte, intitulé « Les Noirs ne lisent pas » M. Dee Lee, nous lance, à nous les Noirs, un défi. Oui ! Un défi nous est lancé. Relevons-le ! Et, pour relever ce défi, il n’y a qu’une voie, et une seule, au-delà de toute rancune et de toute rancœur, c’est de LIRE. C’est ce que je pense.

Léandre Sahiri, Directeur de publication.

Un article paru dans la rubrique ce que je pense du Filament N°5

mardi 15 juin 2010

Édito du 15 juin 2010

Voici la cinquième parution de votre journal « Le Filament ». Nous ne saurions vous inviter à l’ouvrir sans, au préalable, vous remercier, une fois de plus, pour l’accueil cordial et enthousiaste que vous nous n’avez cesse de nous manifester, d’une manière ou d’une autre.

Nous sommes heureux de constater que le nombre de nos lecteurs s’agrandit au fil du temps. Nous sommes encore plus heureux de savoir que « Le Filament » est attendu chaque mois avec impatience et un grand intérêt. C’est le cas de dire, n’est-ce pas, qu’il porte bien son nom. Votre engouement et vos contributions, de plus en plus nombreuses et de qualité appréciable, nous encouragent à poursuivre et à garder la ligne d’indépendance et de liberté qui nous caractérise et qui nous distingue.

Pour écrire, nous privilégions la recherche, l’investigation, l’analyse, la documentation et nous nous éclairons de toutes vos critiques et suggestions, en vue de ne publier que ce qui a de l’intérêt, au-delà de toute complaisance, de tout parti pris, mais avec le seul souci de faire avancer les choses dans le sens positif. Car, notre objectif en publiant ce journal est de contribuer à l’émergence d’une prise de conscience des réalités de nos sociétés et à l’édification d’un monde où l’homme ne saurait se comporter comme un loup à visage humain.
En outre, « Le Filament » est un journal entièrement gratuit qui n’est pas écrit par des employés de la presse, mais par ses lecteurs, avec ses lecteurs et pour ses lecteurs. Il est entièrement gratuit parce que, pour nous, ce qui est primordial demeure : donner des informations basées sur des faits, propager des idées et exprimer librement des opinions, afin de favoriser et faciliter l’accession aux valeurs universelles qui ont permis aux autres peuples de résoudre efficacement les problèmes essentiels de notre existence afin d’accéder à certains degrés d’évolution.

« Le Filament » est un journal qui se veut un vrai carrefour ou une plateforme véritable d’échanges et de débats d’idées, en toute courtoisie. Nous démontrons ainsi qu’on peut ne pas être du même avis et se respecter, qu’on peut s’instruire sans frais et qu’on peut faire des réalisations grandioses sans grands moyens.

En vous souhaitant bonne lecture de cette cinquième parution, nous vous renouvelons notre gratitude, à vous tous et toutes, qui nous soutenez, sous quelque forme que ce soit, vous qui nous aidez volontiers à diffuser largement « Le Filament». Nous vous en sommes très reconnaissants et espérons que vous continuerez, encore et encore, à l’offrir gratuitement, à vos amis, à vos parents, à vos connaissances, par tous les moyens, notamment par email, par fax, par photocopie, par courrier postal, etc.

A très bientôt.

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