samedi 31 mars 2012

De l’implication de Tiken Jah Fakoly dans la rébellion

Dans une interview accordée au journaliste Yacouba Gbané, et publiée le 13 Août 2010, Abdoulaye Traoré alias AB, ex-chef de guerre de Man, a déclaré, en ce qui concerne le rapport de l’artiste Tiken Jah avec la rébellion : « Notre arrestation au Mali a été menée par Tiken Jah. Nous étions en Libye lorsque Tiken Jah nous a demandé de venir le rejoindre au Mali pour parler affaire. Nous n’avons pas trouvé de problème à cela. Puisque, avant l’attaque du 19 septembre 2002, c’est lui qui était notre tuteur au Mali. Quelques jours après notre arrivée, nous avons été mis aux arrêts. Pendant notre incarcération, Tiken Jah n’a pas mis les pieds dans notre lieu de détention. C’est après que nous avons été informés que c’est lui qui a été actionné par les services de Guillaume Soro et les services secrets du Mali pour nous conduire dans ce traquenard. C’est l’un des pions essentiels de la rébellion. Il a joué un rôle très important. C’était un pion essentiel. Il était chargé d’héberger tous les éléments à Bamako. C’est lui le tuteur. Il nous a mis dans toutes les conditions. Il organisait des concerts. Les fonds recueillis étaient mis à notre disposition. Il s’est enrichi dans la rébellion. Il faisait du trafic du coton. C’est son petit frère qui était chargé de convoyer les camions vers le Mali. Il était dans un deal avec Kouakou Fofié… Tout ce que je vous dis, c’est la vérité. Il le sait. Il ne peut pas le nier. C’est lui qui était chargé de galvaniser les troupes à travers des chansons. Il nous encourageait à réussir notre mission. Lui et toutes les autres connexions ne veulent pas de la fin de la guerre. Ils mangent tous dedans. C’est pourquoi, cela nous fait sourire quand on parle de désarmement ».

Après de tels forfaits, du moins après avoir ainsi « mis son art au service de la rébellion » et s’être enrichi par le commerce de tout genre, dans la zone de non droit au nord, si l’on en croit Abdoulaye Traoré alias AB, Tiken Jah Fakoly, chantre autoproclamé de la lutte contre la Françafrique, se donne désormais pour credo la « réconciliation nationale ».

Dans ce cadre, Alassane Ouattara l’a reçu le 11 mai 2011 au Golf Hôtel. Au sortir de l’audience, Tiken Jah a déclaré : «Nous avons évoqué le rôle des artistes dans le processus de réconciliation nationale. Dans les jours à venir, nous allons organiser une tournée nationale de réconciliation qui va parcourir certaines villes de l’intérieur avec l’apothéose ici à Abidjan » .

Dans son nouveau rôle, Tiken Jah Fakoly organise des concerts, anime des conférences de presse, réhabilite l’hôpital Félix Houphouët-Boigny, offre des matelas et des moustiquaires imprégnées. Ne nous laissons pas distraire par de tels actes. Nous savons qu’il joue là au pompier, après avoir joué au pyromane. Nous l’avons entendu claironner : « C’est une manière pour nous d’amener les populations à oublier, un tant soit peu, les affres et les meurtrissures de la guerre, et à s’inscrire dans la réconciliation, car il est dans l’intérêt de toutes les filles et fils de la Côte d’Ivoire de se réconcilier » .

Que Tiken Jah Fakoly se détrompe ! Ce ne sont pas ses tintamarres et autres fadaises qui feront oublier…, qui feront se réconcilier les Ivoiriens. Car, se réconcilier, c’est dialoguer ; et dialoguer signifie qu’on communique. Mais alors, peut-on communiquer sans être sur la même longueur d’ondes? Peut-on aller à la réconciliation quand le peuple n’a pas fini d’enterrer ses morts, n’a pas fini de les pleurer, encore moins de faire le deuil ?... Même si on peut obliger une personne à applaudir, saurait-on l’obliger à être contente ?…

Que Tiken Jah Fakoly se détrompe ! Les Ivoiriens ont compris son double jeu, comme le confirme le texte intitulé « Le double “je” de Tiken Jah » que nous vous proposerons à lire ou relire dans notre prochaine parution.

Léandre Sahiri et Julius Blawa Gueye.

(Extrait de « Côte-d’Ivoire : Mettre fin à la tyrannie et restaurer la démocratie »).

mardi 27 mars 2012

L’avarie de la République

« Vient un temps où le silence devient trahison ». (M. L. King)
Les marins utilisent le terme avarie, pour désigner les dommages subits par un navire en mer. Si nous devons transposer ce terme en politique nous n’hésiterons pas à dire ici que lorsqu’un Etat est incapable d’assurer ses fonctions régaliennes, il est dans la situation d’un navire avarié.

- Il ne faut pas se le cacher, la Côte d’ivoire a de la peine à payer ses fonctionnaires. 
– Personne ne peut dire aujourd’hui avec exactitude quand les universités ouvriront leurs portes pour la prochaine rentrée. 
– Personne ne peut vous dire si vous pouvez quitter Abidjan pour aller à Abengourou sans que des coupeurs de routes ne s’en prennent à vous pour vous rançonner et violer votre femme et vos filles sous vos yeux. 
- La police et la gendarmerie n’interviendront pas en Côte d’Ivoire pour vous protéger contre les bandits devant votre porte. – En ce qui concerne les FRCI, on est tenté de se demander s’ils sont là pour protéger les Ivoiriens ou pour soumettre les ivoiriens au régime politique dirigé par le Dr Alassane Ouattara ?

L’image de l’Etat déliquescent et de la république avariée est apparue dans toute sa clarté au matin du 5 août 2011, quand un accident de la circulation s’était produit sur le Pont Houphouët-Boigny et qu’un chauffeur de bus perdant totalement le contrôle de son véhicule, plonge dans la Lagune Ebrié, avec ses passagers.

La réaction naturelle des Ivoiriens fut naturellement d’appeler la marine nationale du pays à deux pas des lieux pour porter secours aux passagers du bus. Ils furent tous abasourdis de savoir que la Côte d’Ivoire n’a plus de marine car tout le matériel de la caserne fut pillé dans l’immense ivresse et la kermesse sanglante qui avait accompagné la chute du président Laurent Gbagbo.

Dans ce cas il faut appeler les pompiers. Ils arrivent sur les lieux eux aussi avec leurs sirènes hurlantes, pour constater qu’ils n’ont plus le moindre matériel de plonger. Quel est donc ce pays bizarre qui dans une sorte de cécité sans fin se dote d’une marine qui n’a aucun matériel de plongée ? La réponse est simple, il ne faut plus croire en la Côte d’Ivoire, ce n’est qu’une république cacaoyère en état d’avarie très prononcée.

Le plus ridicule est que ce sont les petites embarcations de pécheurs et surtout les pinasses qui agissent dans la navigation urbaine informelle qui ont été les premiers à porter secours aux victimes. Du côté des autorités il a fallu attendre vers 11h30 pour voir le bus sortir de l’eau grâce à une grue de circonstance. Quand, dans un pays qui prétend se respecter, c’est l’informel qui vient au secours du formel, il faut s’interroger sur la nature de l’Etat.

Les USA, le Canada et tous les pays de l’union européenne, y compris la France, qui embrassent Ouattara sur la bouche, déconseillent à leurs ressortissants de mettre les pieds en Côte d’Ivoire. Cela est vérifiable sur tous les sites des ambassades accréditées à Abidjan. En déclarant à l’étranger qu’il n’était pas au courant des exactions des FRCI, le président Ouattara, à sembler soutenir ses troupes dans le mal contre d’autres ivoiriens, cela n’a fait que raviver les vieux instincts de méfiances entre ivoiriens.

La république avariée c’est l’incapacité du gouvernement de redéployer l’administration dans le nord du pays. Car les pays voisins des frontières nord envers qui Ouattara, est redevable veulent continuer à exporter du bois, du diamant, du coton, du cacao et du café de Côte d’ivoire.

L’Etat avarié ne peut pas protéger ses propres habitants contre son insuffisance et sa propre malfaisance, il entraîne ainsi l’ensemble de la nation dans un précipice. C’est l’image de la Côte d’ivoire Moribonde et grabataire dans un constat douloureux car tous ceux qui aiment ce pays, doivent se taire pour éviter les représailles du régime très démocratique des FRCI.

Dr Serge Nicolas Nzi 
(Chercheur en communication, Directeur du centre africain d’études stratégiques, Lugano, Suisse). 

Paru dans Le Filament N°20

A propos du « Carton rouge » de M. Aly Touré aux communicateurs d'Alassane Ouattara

Il y a quelques jours, j’ai pu lire avec attention un article de M. Aly Touré publié dans le quotidien Le Banco.net du mardi 20 décembre 2011. Comme à mon habitude, je permettrai d’émettre quelques réflexions que m’ont inspirées les propos de M. Aly Touré dans cet article intitulé : « Dénigrement de Ouattara par des Camerounais : Carton rouge aux communicateurs d'ADO ! »

Dans son article, M. Aly Touré fait remarquer que « Sur le bouquet Canal+, il y a une chaîne de télévision appelée "Vox Africa" qui s'illustre par des émissions farouchement hostiles au président Alassane Ouattara et à son régime. Selon M. Aly Touré, cette chaîne ne rate aucune occasion pour ouvrir son plateau, ainsi que ses ondes, aux détracteurs du Président ivoirien : « Des balivernes y sont distillées régulièrement », écrit-il, tout en déplorant qu’il n’y ait jamais eu aucune réaction contre cette chaîne de télévision visiblement hostile au régime, ni de la part, des membres de l’entourage du président, ni de son Cabinet, ni des agents de son service de communication, ni du RDR d'Amadou Soumahoro. Ces gens-là sont tous disqualifiés (« carton rouge »). Et ceci donne à réfléchir…

Et la réflexion, affirme-t-il, conduit à une interpellation directe du régime Ouattara, c'est-à-dire le chef de l'État lui-même et le Rassemblement Des Républicains (RDR) : « il serait temps qu'ils se réveillent et en prennent de la graine. S'ils restent là à ne couver que leurs égoïstes intérêts personnels, comme une poule couvant ses œufs, demain ils risquent d'être surpris et de n'avoir que leurs yeux pour pleurer », écrit M. Aly Touré

De tels propos nous interpellent et appellent les observations suivantes :

1°/ contrairement à ce que pense M. Aly Touré, les personnes qui participent aux émissions de "Vox Africa" ont le droit d’agir, de parler, d’écrire, de manifester librement, et en toutes circonstances, en tous lieux, leurs idées et leurs opinons. Cette libre communication des pensées et des opinions, constitue ce qu’on appelle la liberté d’expression. C’est la liberté d’expression qui autorise toute personne à s’exprimer librement, lui donne le droit de juger les paroles et les actions d’Alassane Ouattara (comme de tout autre gouvernant), du moins de porter des objections sur ses discours et les actes qu’il pose, de tenir un discours sur ses discours . En effet, c’est au nom de la liberté d’expression qu’un journaliste, en informant le public, a le droit de s’élever contre un gouvernant, de dénoncer ou mettre à nu les tares au plan social et politique. Cela ne signifie pas qu’Alassane Ouattara est attaqué, ni que l’ordre est troublé. Bien au contraire. M. Aly Touré doit s’instruire humblement de ces principes fondamentaux de la démocratie, et doit ne pas perdre de vue que la liberté d’expression est, en démocratie, l’un des droits essentiels et inaliénables et l’un des garants de l’état de droits.

2°/ M. Aly Touré, au cas où il l’ignorerait, doit simplement apprendre que, au nom de la liberté d’expression, un gouvernant est censé étouffer la démocratie et abuser de son pouvoir, dès lors qu’il s’identifie à l’ordre, aux lois et au gouvernement, dès lors qu’il censure ou interdit les libres opinions, dès lors qu’il sanctionne, condamne les journalistes, les artistes, les écrivains, les intellectuels... Agir ainsi est une absurdité qui annihile la démocratie et qui avilit. Parce qu’un tel gouvernant, empêche l’échange des idées, la diffusion des vérités nouvelles ; il rejette l’enseignement des théories contraires à sa politique personnelle ; il bannit toute action et activité susceptible d’aider au progrès de la société.

3°/ contrairement à ce que pense M. Aly Touré, les personnes qui participent aux émissions de "Vox Africa" ont le choix d’être favorables ou hostiles au régime, au nom de la liberté d'opinion qui est affirmée solennellement dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, article 10. Rappelons que la liberté d'opinion signifie que toute personne est libre de penser comme elle l'entend, libre d’être d’accord ou en désaccord avec autrui, libre d'avoir des opinions contraires à celle de la majorité ou des autorités. La Déclaration de 1789 précise d'ailleurs que cette liberté d'opinion s'étend à la liberté religieuse, chacun étant libre d'adopter le culte de son choix, ou de n'en adopter aucun.

4°/ contrairement à ce que pense M. Aly Touré, la critique ne procède pas forcément d’une intention malveillante. La critique et les observations sur un individu, sur une idée, sur une décision sur un régime ne procèdent pas toujours d’un esprit chagrin, mais aussi et souvent du souci d’en révéler les failles, les défauts, les faiblesses, les errements, les insuffisances, en vue d’en améliorer les pratiques, les rouages, les structures, l’organisation, etc. Pouvoir critiquer librement témoigne de l’existence et de la réalité des droits et libertés des citoyens dans un pays, surtout lorsqu’il s’agit de république démocratique. S’en prendre aux défauts d’un être humain garantit son existence et témoigne de l’intérêt qu’on lui porte et, parfois participe de la volonté de voir les choses changer, évoluer différemment.

5°/ L’objectif de M. Aly Touré est clair et nous l’avons bien compris : il s’agit de tirer sur la sonnette d’alarme. Pour M. Aly Touré, il est temps, et même grand temps, que les membres de l’entourage de Ouattara et de son Cabinet, les agents de son service de communication, les militants du RDR « se réveillent et en prennent de la graine », passent à la vitesse supérieure dans la violence et la criminalité. Autrement dit, il vise à inciter les militants, véritable horde de chiens à visage humain, à aboyer et à surtout à mordre à belles dents. Et, pour que la mayonnaise prenne, M. Aly Touré dénature tout : pour lui les débats télévisés sont des « balivernes », les critiques relèvent du « Dénigrement de Ouattara » ou participent d'« une savante entreprise de dé-légitimation à terme du Président Alassane Ouattara », etc.

6°/ Par sa soi-disant « interpellation directe du régime Ouattara », M. Aly Touré voudrait-il, diantre ! nous faire revenir à vingt ans, trente ans, cinquante ans… en arrière?... Peut-il, un seul instant, se rendre compte que c’est très mal conseiller son mentor, et que c’est même indiquer à celui-ci une issue fatale, de la même façon que hier, quelques demeurés lui ont conseillé, idiotement, d'envoyer Laurent Gbagbo à la CPI. En tout cas, tout cela, comme qui dirait, est cocasse, ridicule ! On devrait en rire si ce n'était pas si triste, si nous n’entrevoyions pas le lourd tribut à payer…

7°/ Par sa soi-disant« interpellation directe du régime Ouattara », M. Aly Touré sait-il qu’il a ainsi signé le certificat de décès de la « réconciliation nationale » ? Alors, aux calendes grecques la commission de Banny ! M. Aly Touré sait-il qu’il a ainsi ouvert les vannes pour plonger notre pays dans un état permanent de guerre ? Car, ce qu’il ignore peut-être, c’est que nous n’accepterons plus d’être nargués, menacés, tués. Trop c’est trop ! Nous n’avons pas d’autres choix que de nous défendre, de nous battre, de combattre jusqu’à sa mort ce régime dont nous sommes les victimes et qui est en mission de déconstruction de la Côte d’Ivoire.

8°/ M. Aly Touré sait, ainsi que les autres, que nous avons toujours suggéré des moyens sûrs, y compris le dialogue, pour aller à un « vivre ensemble » fiable, mais cette voie est d’emblée rejetée. Par conséquent, seule reste la riposte la plus appropriée aux actes qu’ils vont être désormais posés. Nous avons mis en place une batterie de moyens pour réagir, pour nous libérer du joug d’Alassane Ouattara, pour gérer les rapports entre les pro-Ouattara et nous. La fin de la peur est déclarée et puis, le RDR n’a pas le monopole de la violence.

9°/ M. Aly Touré et les partisans d’Alassane Ouattara doivent savoir que le pouvoir de leur mentor les conduit à l’abattoir. La sagesse populaire nous instruit qu’on peut être fort le matin, puis être faible à midi ou le soir. De même Alassane Ouattara partira tôt ou tard. C’est la loi de la nature que toute chose ait une fin. Alors, M. Aly Touré et les partisans d’Alassane Ouattara doivent se poser la question de savoir quel avenir cet homme leur propose dans la désunion, pour eux-mêmes, mais aussi et surtout quel avenir pour leurs enfants ? Alors, M. Aly Touré et les partisans d’Alassane Ouattara devraient plutôt penser à l’après ADO, dès aujourd’hui même, et devraient s’abstenir de poser tous actes susceptibles d’obscurcir leur avenir.

Quoiqu'il m’en coûte, c’est ce que je pense... 

 Léandre Sahiri 

lundi 26 mars 2012

Assez de nous investir dans tout ce qui étouffe notre conscience et notre cerveau.

Dans l’écriture de l’histoire récente de notre pays, on retiendra sans doute 2011 comme une année de tous des périls de toutes les valeurs. L’inculture a suppléé la Culture dans une indifférence totale. On a vu un peuple délaissé et désespéré. Un temps tourmenté où se sont mêlés révoltes, douleur, déshumanité… mais aussi espérance et foi en Demain...

Dans cette période troublée que nous vivons, notre avenir sera déterminant par notre capacité, à lutter et à promouvoir la Culture dans toutes ses dimensions. Parce que si des motifs d’inquiétude et de colère ne manquent pas, ceux d’espoir sont en germe. A chacun de nous de les voir, de les partager pour les faire éclore et les propager.

Parce qu’un peuple inculte est dangereux pour lui-même, mais pour l’avenir aussi. C’est pourquoi, notre engagement pour le Livre doit rester inaltérable. Il doit être impérativement préservé. Parce que rien ne pourra nous sauver si, au cours de notre évolution imposée par la société moderne, nous ne parvenons pas à faire en sorte que l’Amour du Livre y soit exalté...

Parce que l’absence tragique du Livre de notre quotidien est un vrai drame. Oser le dire en 2012 peut paraître paradoxal. A l’heure où les maisons d’éditions ont poussé comme des champignons et où, partout, on détecte des talents d’écriture. Mais loin s’en faut. Car, s’est-on demandé quel avenir est réservé au livre et à l’Art en général dans une société vouée au profit immédiat ? Le nombre inquiétant de livres qui moisissent dans les rayons de librairies ou dans les tréfonds des entrepôts est là pour nous réveiller. N’y a-t-il pas plusieurs façons de « tuer » des livres ? Et la plus insidieuse est de faire en sorte que les gens ne soient plus capables de les lire.

Il est vrai que ce genre de cris d’alarme a trouvé peu d’échos dans notre pays ces dernières années… On a, de tout temps, pensé que « plus le peuple est inculte, plus il est facile à diriger ».

Notre Histoire récente ne nous a pas montré le contraire. Saurions-nous alors en tirer de grandes leçons ?…

Qu’espère notre peuple quand le livre reste désespérément absent de son quotidien ? Vecteur de valeurs, de savoirs, du sens esthétique et de l'imaginaire, le livre est avant tout une oeuvre de l'esprit, de la créativité et de la culture des hommes. Il enrichit, de ce fait, le patrimoine immatériel de l'humanité. Le livre constitue, d'autre part, dans les économies du savoir d'aujourd'hui, un instrument d'apprentissage, de partage et d'actualisation des connaissances essentielles à l'exercice de tous les métiers. Lire, c’est donc grandir en esprit. C’est devenir plus responsable de ses actes. C’est vivre les yeux grands ouverts.

Dans «Les mots», Jean-Paul Sartre raconte : « Je n’ai jamais… quêté des nids, je n’ai pas… lancé des pierres aux oiseaux. Mais, les livres ont été mes oiseaux et mes nids, mes bêtes domestiques… la bibliothèque, c’était le monde pris dans un miroir. Elle en avait l’épaisseur infinie, la variété, l’imprévisibilité ». Parce que le Livre, disons la lecture, nous donne des outils pour que nous devenions acteur de notre propre vie et nous offre des moyens qui nous permettent d'effectuer des choix judicieux pour nous-mêmes et pour notre Nation.

En cette année 2012, que les enfants voient, de temps à autre, papa ou maman lire un livre !... Car par le Livre, on pourrait donner aux enfants les armes essentielles pour comprendre la société dans laquelle nous vivons ; par le Livre aussi on pourra faire disparaître notre ignorance et notre incapacité à comprendre les choses les plus banales du fonctionnement des sociétés humaines.

Aimons les bibliothèques et les librairies, furetons dans leurs étagères, saisissons-y un livre, ouvrons-le en son milieu, parcourons-le au hasard. Et si nous pensons que les enfants de Demain méritent mieux que des gadgets, si nous pensons que l’Homme et le Citoyen ivoirien de Demain ne peuvent être réduits à être de simples consommateurs, si vous pensez qu’il est dangereux de livrer la Côte d’Ivoire aux seuls marchands de profits, semons le Livre afin de récolter la Culture. Qu’en cette année 2012, tous les journaux aient leurs suppléments de «Livre» ainsi que le font déjà Le Nouveau Courrier et Le Temps.

Qu’en 2012, nous osions soumettre nos manuscrits aux éditeurs, que nous nous battons pour que nos textes soient acceptés sans trop de modifications ! Que nous luttions pour que ces mêmes éditeurs fassent correctement leur boulot et qu’ils paient nos droits d’auteurs !

Que 2012 soit « la source d’un nouvel enracinement et d’une soif d’engagement qu’aucune médiocrité ne peut épuiser ». Que l’on rompe d’avec cette excellence nationale de toujours accorder la prime à la médiocrité. Certaines volontés se sont émoussées peu à peu au contact d’un système qui gère la stagnation au mieux de ses intérêts. Alors, il nous faut être nombreux à tirer la sonnette d’alarme car ç’en est assez de dire que les Ivoiriens ne lisent pas. Ç’en est assez d’entendre que le Livre coûte cher et de nous voir, au quotidien, nous investir dans tout ce qui étouffe notre conscience et notre cerveau.

Serge Grah

Paru dans Le Filament N°20

Appel aux scientifiques africains

Nous les Africains, nous avons souvent tendance à exhiber nos titres. Partout où nous nous trouvons, nous sommes fiers de faire voir et de faire savoir qu’on est docteur en ceci ou en cela, ingénieur en x ou y. Et pourtant, nous n’avons rien produit, ni créé, ni inventé. Ceux qui prétendent être des docteurs en chimie ou en physique ne se sont jamais signalés par leurs découvertes. De même, les soi-disant ingénieurs en agronomie n’ont jamais rien trouvé, ne serait-ce que du simple composte, pour aider l’agriculture africaine.

De même, les prétendus docteurs en économie n’ont jamais tenu de conférence publique, ni écrit des livres, ni inventé des théories économiques. Bien au contraire, ils sont les fidèles élèves du FMI ou de la Banque mondiale pour faire appliquer des « plans d’ajustement structurels » aux dépens et au mépris des populations du tiers-monde. Le pire est que, à côté de ceux qui ont mérité d’avoir fait, effectivement, des études sérieuses dans les plus brillantes institutions occidentales, il y a des « faux monnayeurs » de titres ou des trafiquants de diplômes et autres mécréants qui, avec leurs mensonges et bouffonneries, nuisent à la réputation des Africains de la diaspora…

Pourquoi certains Africains s’attachent plus aux diplômes, aux titres qu’aux réalités de l’école de la vie ? Pourquoi certains Africains pensent-ils que le diplôme fait l’homme ? Pourquoi certains Africains refusent-ils de reconnaître leur ignorance ? Pourquoi certains Africains refusent-ils d’apprendre, de s’instruire, de lire, pour améliorer leur niveau social et intellectuel, pour se faire valoir et avoir des atouts pour mieux servir au développement de nos sociétés africaines ?... Beaucoup d’Africains se font passer pour des savants et pourtant l’Afrique souffre de tous les maux et accuse du retard au développement dans tous les domaines, notamment politique, économique, social, culturel, technologique, etc. Où sont-ils donc ces grands savants qui émettent des grandes théories dans les salons et qui, pourtant, n’ont jamais fait de découvertes ? Où sont-ils ?

Un autre fait est que nombreux sont les Africains qui se font passer pour des « intellectuels ». Et là, le mot intellectuel est galvaudé, torturé, en tous les langages. Et, il se trouve alors que, malheureusement, très peu de gens l’utilisent à sa juste valeur. On ne se rend pas compte qu’on est soi-même ridicule en prétendant être titulaire d’un diplôme qui n’est pas mérité ou qu’on n’a pas. Evitons de nous laisser éblouir par les apparences et les titres ronflants. Contempler un diplômé ne se situe point au niveau du diplôme.

Reconnaître qu’on est ignorant et qu’on a besoin de savoir, ce n’est pas un fléau. C’est plutôt faire preuve d’humilité, de grandeur d’âme qui peut nous inciter à nous enivrer de connaissances en vue de combler le vide que l’ignorance a creusé en nous.

Scientifiques africains, plutôt que de vous faire admirer dans des petits salons et dans des réunions insignifiantes, faites-vous valoir par des écrits susceptibles d’apporter des lumières aux peuples africains, de nous sortir du sous-développement, de nous permettre de mieux réfléchir aux moyens adéquats pour notre épanouissement, pour notre libération, pour la construction de la bâtisse d’une vraie collectivité africaine.

Thomas Oholli Niamké

Paru dans Le Filament N°20

samedi 10 mars 2012

De M. Henri Konan Bédié, que retiendront les Ivoiriens ? (3ème partie)

La Gestion politico- économique du président Bédié

Ceux qui mangent à  la table du président Bédié sont louangeurs sur son bilan et sa gestion politico-économique du pays sous son régime. Il faut reconnaître le service de la dette de 22 milliards de dollars et une dette intérieure presque équivalente. La dévaluation du franc CFA, la baisse des cours mondiaux du café et du cacao, associé à une dégradation des finances publiques et un reflux des investissements privés…
Le taux de croissance, un peu plus de 5% en 1998, brandi comme un trophée, ne rend que très imparfaitement compte  de la crise de confiance qui s’est installée dans le pays, amplifiée par la détérioration des relations avec les institutions financières internationales.

Les scandales financiers

Il faut ajouter à  tout cela les scandales financiers du trésor et surtout le détournement des 18 milliards de francs CFA d’aide budgétaire de l’union européenne octroyés au secteur sanitaire du pays. Ce détournement fut remboursé  par le trésor de l’Etat alors que les coupables se promènent encore librement aujourd’hui.
La Côte d’Ivoire, sur ce plan, ressemble à un pays bizarre où il n’y a pas de sanctions quand on détourne le bien public. La surfacturation des complexes sucriers en amont n’avait jamais fait l’objet de poursuites judiciaires.
La dernière observation économique, concerne le monopole de l’importation du riz aux membres de la famille du président Bédié et à leur présence dans plusieurs conseils d’Administration d’entreprises.
Tous ces éléments avaient fini par convaincre les Ivoiriens que Konan Bédié s’occupait plus de ses intérêts personnels, au lieu de leurs difficultés quotidiennes.
N’évoquons même pas ici les travaux pharaoniques, qu’il avait entrepris dans son village de Daoukro et du château de son épouse à Koukourandoumi, dans la région d’Aboisso, que les Ivoiriens sidérés ont découvert que le carrelage de la salle de bain, était fait avec des pièces de 250 f cfa.

Le coup d’Etat 

Que ceux qui entourent le Président Bédié aujourd’hui, nous donnent une explication cohérente sur les clameurs de joie et l’allégresse générale qui s’étaient emparés des Ivoiriens à l’annonce du coup d’Etat ?
Les Ivoiriens savaient tous qu’une junte militaire n’a jamais fait le bonheur d’un peuple en Afrique.
Pourquoi le coup d’Etat a-t-il été vécu comme une sorte de délivrance ? Pourquoi certains l’ont-il qualifié de « salutaire » ? Pourquoi la gendarmerie ivoirienne dont la haute hiérarchie était proche du président Bédié n’est-elle pas intervenue dès le début de la mutinerie pour rétablir l’ordre avec ses commandos d’élites?
Pourquoi le PDCI-RDA, a-t-il pris aussi rapidement acte du coup d’état ? Et pourquoi beaucoup de ses cadres se sont-ils empressés de rejoindre le général Robert Gueï et sa transition militaire chaotique ?…
Nous pensons que le président Bédié et son parti ne peuvent pas prétendre revenir au pouvoir en faisant l’économie d’un tel débat devant tous les Ivoiriens.
 
Le fameux  conseil national de sécurité
Beaucoup d’officiers supérieurs de l’armée ivoirienne continuent de dire, avec amertume, que l’idée d’un conseil national de sécurité pour coordonner les actions du gouvernement en matière de sécurité intérieure et extérieure, était une bonne chose, souhaitée par tous. Sauf que le président Bédié en avait fait un outil politique, avec des moyens à disposition pour coiffer l’Etat major général des forces armées ivoiriennes.
La création du CNS, rattaché directement à la présidence, avait suscité  la méfiance entre les officiers compétents ayant une parfaite maîtrise des dossiers sécuritaires et leurs collègues, les courtisans du régime. Cela avait balkanisé les services et les hommes, qui ont finalement travaillé en s’ignorant mutuellement. 
C’est ainsi que les renseignements militaires et les renseignements généraux, sont restés sourds et aveugles, sans voir venir le coup d’Etat de Noël 1999, dont toute la sous région ouest africaine savait qu’il était en préparation.
Rentré précipitamment de Daoukro où il était allé boire, manger, fumer son cigare et fêter son accession à la présidence de la république comme un trophée ou une médaille olympique, le président Bédié s’était retrouvé dans une situation lamentable où ni son ministre de la défense, ni ses officiers supérieurs n’étaient capables de lui dire qui étaient les mutins et de quoi il s’agissait.
Certains parlaient de mutinerie, de primes impayés des soldats, bref à un moment aussi important de la vie de la nation, le président était livré  à lui-même et avait fait le choix de sauver sa vie en allant se cacher chez l’ambassadeur de France.

Les pseudo certitudes du président Bédié

En politique, il faut se méfier des laudateurs,  des allégeances d’un jour et surtout de ceux qui vous font croire à longueur de journée que le peuple est avec vous et qu’il vous aime, et qu’il est même prêt  à mourir pour vous. Tout cela n’est que balivernes. Quand on dirige un pays, il faut toujours adopter des positions morales sur les questions relevant du vivre ensemble et de la paix sociale.
L’arrestation des dirigeants politiques du RDR, le mandat d’arrêt international lancé  contre Alassane Ouattara, le refus du PDCI et de son chef à organiser des élections transparentes, avec le bulletin unique,  ainsi que le vote  des électeurs  âgés de 18 ans, le refus des voies de l’apaisement et enfin ce maudit discours du 22 décembre 1999 à  l’assemblée nationale, discours plein de certitudes et qui fut l’illustration d’une vraie myopie politique.
En choisissant la logique de la confrontation au détriment d’un dialogue utile avec le RDR, le président Bédié  avait aggravé le climat de tension dans le pays en faisant de ses propres certitudes un projet politique. C’est certainement ce maudit discours du 22 décembre qui fut l’élément déclencheur du coup d’Etat de Noël 1999. Comme disent souvent nos parents malinkés : « L’arbre que la tempête va renverser ne voit pas l’orage qui se prépare à l’horizon, sa tête altière brave le vent, alors qu’il est près de la fin ».
Ce fut le cas de Soumangourou Kanté,  peu avant la bataille de Kirina, contre les troupes de la coalition que dirigeait, Soundjata Keïta,  en Janvier 1235.  Ce fut aussi l’Etat d’esprit du président Bédié, en cette veille de Noël 1999.

Un mot sur le PDCI-RDA 

Nous voulons rappeler au PDCI-RDA et à ses militants que, que le RDR, est sorti des entrailles de leur parti ainsi que l’UDPCI. Pourquoi sont-ils partis et pourquoi, dès le début, rien n’a été fait pour trouver un terrain d’entente avec eux. Toutes ces divisions ont été  pour beaucoup dans l’affaiblissement général du PDCI et de son président.
Comme nous l’avons dit au début de notre intervention, ce parti avait perdu son unité  dès les premières minutes du décès du Président Félix Houphouët-Boigny, le 7 décembre 1993.
Le regret de tous les Ivoiriens est que le parti qui a conduit notre pays à l’indépendance a été incapable de nous éviter ce fruit très amer qu’est le coup d’Etat. Pourquoi le bureau politique n’a-t-il pas fait bloc autour du successeur constitutionnel dès le décès du Premier président ivoirien ?
Pourquoi le PDCI-RDA, a-t-il cautionné la cabale de l’ivoirité ? Pourquoi les négociations entre les mutins et le président ont-elles si tardé  et échoué aussi facilement ? Si l’affaire Ouattara était un contentieux sur la nationalité, pourquoi n’avoir pas laissé  la justice trancher ? Car cela relève de la justice et non du politique.
Est-ce  vraiment sérieux aujourd’hui pour le PDCI et son chef d’aller encore solliciter les suffrages des Ivoiriens sans un début de réponses, d’explication de toutes ces questions importantes de société ?… 

jeudi 8 mars 2012

La dévaluation du franc CFA est le gilet de sauvetage d’une France en péril

Les conséquences liées à la perpétuation de la politique de dépendance des pays africains sont notoires. Manque de compétitivité, dépendance vis-à-vis de l’économie française, dépendance vis-à-vis de l’armée française sans oublier la politique d’ouverture en faveur des entreprises privées françaises. Il existe toutefois des différences plus subtiles.
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Les entreprises françaises en Afrique francophone, grâce à leur position protégée de monopole ou d’oligarchie, contribuent, de manière substantielle, au PNB de ces pays. Mieux encore, elles sont souvent les seuls gros contribuables. Dans nombre de ces pays, les entreprises françaises contribuent pour plus de 50% aux recettes fiscales nationales. Ce qui leur donne un statut particulier. Il n’est donc pas rare d’entendre les Français clamer que, sans leurs entreprises, les économies africaines tomberaient en ruines. Lorsqu’on considère qu’en outre, ces pays n’ont nullement accès à leurs réserves en devises, cette affirmation est sans aucun doute fondée. Cela ne signifie pour autant pas que des entreprises d’autres pays, tels que les Etats-Unis et la Chine, seraient incapables de contribuer autant, mais simplement que les Français deviennent frileux lorsqu’il s’agit d’ouvrir ce marché à la concurrence.

Cinquante ans après les indépendances, le France garde la mainmise sur la plupart des infrastructures et compte dans ses réserves en devises les fonds des 14 pays de la zone franc. Les sociétés de transport aérien, de télécommunications, d’eau et d’électricité, de même que les grandes banques sont françaises. Les accords de coopération signés après l’indépendance par le président Félix Houphouët-Boigny et le premier ministre français de l’époque, Michel Debré, restent aujourd’hui techniquement applicables. La France maintient son étau sur le commerce et la monnaie de la Côte-d’Ivoire, ce qui continue de réduire à néant des initiatives nationales pour l’indépendance. 

Cette position privilégiée de la France a été confirmée par un rapport des Nations Unies. « Les témoignages rassemblés nous ont également permis de constater qu’il existe un lien entre la loi de 1998 sur la pauvreté en milieu rural et la position dominante de la France et les intérêts français en Côte-d’Ivoire » [Traduction].
Les mêmes sources indiquent que les Français sont propriétaires de 45% de la terre en Côte-d’Ivoire. Pire encore, les bâtiments de la Présidence de la République et de l’Assemblée nationale de Côte-d’Ivoire font l’objet de contrats de bail avec la France […]

Pourquoi dévaluer le franc CFA?

La France est en faillite. Elle croule sous le poids d’une dette publique et bancaire énorme. C’est le pays de la zone euro le plus exposé  à la dette grecque et italienne, entre autres. Et la France s’est engagée dans un nouveau plan d’austérité. Sa cote de solvabilité  est sur le point de perdre son statut de triple A et les banques privées devront subir une importante décote de leur dette au sein de l’Europe. Les énormes dépenses engagées dans la guerre en Libye ont englouti la majeure partie de son budget annuel. Et si elle a tenu le coup jusqu’ici, c’est grâce au coussin que lui offre les dépôts de réserves effectués au Trésor français depuis 1960 par des pays africains. Beaucoup de ces réserves existent aussi bien sous forme d’actions au nom du Trésor français que d’obligations ayant compensé et garanti un nombre important d’emprunts d’Etat français.  

Les pays francophones d’Afrique se rendent de plus en plus compte qu’ils risquent de ne plus jamais rentrer en possession de leurs avoirs accumulés dans le Trésor français qui les a lourdement hypothéqués sous forme de contributions de la France à plusieurs plans de sauvetage de l’économie européenne. Wade du Sénégal a une fois encore demandé  des comptes. Et personne n’est prêt à lui en donner. Alassane Ouattara de Côte-d’Ivoire et Denis Sassou-Ngesso du Congo Brazzaville ont été persuadés de la nécessité de dévaluer le franc CFA et chargés d’en informer leurs pairs africains. De l’avis des économistes, une telle dévaluation permettrait de soulager la France d’environ 40% du poids de sa dette et de donner une nouvelle marge de manœuvre au Trésor français.  

Par contre, une telle mesure aura des effets dévastateurs sur l’Afrique. Les pays de l’Afrique francophone avaient souffert énormément lors de la dernière dévaluation, exception faite des présidents et de leur entourage. La dévaluation est avantageuse si l’on a des produits à exporter, car elle rend les exportations relativement moins coûteuses. Or, la plupart des pays francophones d’Afrique n’ont que les matières premières et le pétrole à exporter. Les produits manufacturés, les services et biens immatériels proviennent presque tous de la France ou transitent par elle.
Les denrées alimentaires sont importées hors de l’Afrique et leurs prix autant que les coûts de transport augmentent de jour en jour. Des signes d’inflation étaient déjà perceptibles en début d’année. Le taux d’inflation en Afrique de l’ouest a grimpé à  4,1% en janvier, alors qu’il était de 3,9% le mois précédent. Cette progression de l’inflation dans les huit pays de la zone UEMOA, qui utilisent le franc CFA rattaché à l’euro, était essentiellement due à l’augmentation des coûts des denrées alimentaires, des transports, du logement et des communications. Le taux d’inflation moyen est passé de 0,4% en 2009 à 1,4% en 2010 ; une augmentation justifiée par la hausse des prix du carburant et des denrées alimentaires […]
Malgré  cela et en dépit de la pauvreté qu’entraînera la dévaluation annoncée, peu de présidents africains sont prêts à renoncer au Pacte colonial et arrêter les énormes dégâts causés par le néo-colonialisme français dans la région. Si la France a dilapidé ses fonds et a trop embrassé dans la dette européenne et dans la destruction de la Libye, il n’appartient certainement pas aux Africains de payer la note de telles aberrations.
 
Dr Gary K. Busch

Traduit de l’anglais par Constantin D. Lebogo

mercredi 7 mars 2012

« Les faux complots d’Houphouët-Boigny », de Samba Diarra

Une satire politico-sociale qui dépeint les intrigues politiques du Président Houphouët-Boigny

Professeur de gynécologie-obstétrique et membre de l`Académie des Sciences des Cultures africaines et de la Diaspora (Ascad), Samba Diarra, né  le 31 avril 1931 à Adjamé, est décédé le 26 juillet 2010, des suites d’une longue maladie, à Abidjan. Figure emblématique de l’élite ivoirienne, ses prises de position rompaient avec l’unanimisme au PDCI, alors parti unique.

On se souvient, à ce propos, de son livre « Les faux complots de Houphouët-Boigny », préfacé par Bernard Dadié et publié en 1997, aux éditions Karthala. C’est une satire politico-sociale qui dépeint sans fard, ni gang, les intrigues politiques du règne du Président Houphouët-Boigny, comme si Samba Diarra était décidé à en découdre avec ses opposants, réels ou imaginaires. Samba Diarra démontre que, pour sécuriser son pouvoir politique qui a fait de lui, l‘interlocuteur incontournable sur la scène politique africaine en général et dans la sous-région ouest africaine en particulier, le Président Houphouët-Boigny a imaginé une série de complots partout dont la répression n’a souffert d’aucune faiblesse. Dans le même ordre d’idées, Amondji écrit dans son livre : « … »

Samba Diarra a levé, à travers ce livre, le voile opaque qui a couvert pendant longtemps les complots imaginaires de l‘ancien Président du PDCI ; un président qui avait décidé de régner sans partage sur la Côte d’Ivoire. Ce qui du reste, a montré le contraste effrayant entre cet Houphouët-Boigny là qui préférait l’injustice au désordre, qui régnait en maître absolu et l’autre Houphouët-Boigny, plus connu surtout à l’extérieur comme le « sage » qui voue un culte sacro-saint à l’humanisme, au dialogue, à la paix et la foi religieuse. 

A travers ce livre, que Samba Diarra  lui même qualifie de « voyage dans un enfer tropical », le lecteur constate qu’il y a une volonté  d’écrire pour éclairer la nuit qui couvre la Côte d’Ivoire d’hier et dire le dur calvaire vécu par l’auteur et ses compagnons dans les années 63. L’auteur en bon enseignant, tente de tirer sur la sonnette d’alarme pour que les faits dénoncés ne se reproduisent plus jamais : c’est cela la valeur pédagogique de l’œuvre. C’est un livre satirique qui peut déranger, ébranler des cercles, des clans, des tribus, voire même troubler certains hommes qui ne sauraient comprendre que la belle image du Président Houphouët – Boigny présente des dessous aussi sales et lugubres.

Ce livre reconstitue ces trois complots évoqués et rappeler par la même occasion les répressions dont le Sanwi (Aboisso) et le Guébié  ( Gagnoa) ont été le théâtre. Le livre est le témoignage de l’ancien pensionnaire de la prison d’Etat d’Assabou à Yamoussoukro que fut l’auteur sur les évènements de 1963. L’auteur a été  arrêté le 14 janvier 1963, condamné aux travaux forcés  à perpétuité le 9 avril 1963 et libéré le 4 Août 1966 par grâce présidentielle.
Au total, ce livre lève le voile opaque qui a couvert jusque là  les faux complots imaginaires d’un Président décidé à  régner sans partage sur la Côte d’Ivoire et montre un contraste effrayant entre cet Houphouët-Boigny là et l’autre Houphouët-Boigny, plus connu surtout à l’extérieur, vouant un culte sacro-saint à l’humanisme, la paix et la foi. Les faux complots d’Houphouët-Boigny, un livre à livre absolument!

Serge Grah 

mardi 6 mars 2012

QUEL RÔLE DE L'ECRIVAIN IVOIRIEN FACE AU POUVOIR ?

L’écrivain, c’est notre avis, doit pouvoir prendre position face à tous les problèmes d’intérêt national. Il a le devoir de s’exprimer clairement, en plus de ses créations littéraires, par des contributions, des conférences, des interviewes, pour donner son appréciation sur les grands sujets en vue d’éclairer l’opinion. En d’autres termes, il doit porter un regard critique sur la marche de la cité. Sans prendre forcément la carte d’un parti, il doit se donner le droit à la parole en prenant part à tous les débats politiques qui engagent le destin collectif. Dans la société française d’hier, et encore aujourd’hui, on attend des écrivains qu’ils prennent position chaque fois que se pose une question cruciale mettant en jeu la vie de la nation. On se souvient du rôle capital qu’a joué Emile Zola dans l’affaire Dreyfus.
Or, une telle option, surtout en Afrique, ne peut être sans risque. A un moment donné, l’écrivain se retrouve forcément  face au pouvoir. En position de conflit, en confrontation avec le régime au pouvoir. Si ce dernier ne le musèle pas en le jetant en prison, il lui oppose une censure. Wolé Soyinka a eu maille à partir avec presque tous les pouvoirs au Nigéria. En Guinée, Thierno Monenembo et Alioun Fantouré ont dû s’exiler pour échapper à la dictature de Sékou Touré. Bernard Dadié bien que membre du Pdci Rda de l’époque n’a jamais été tendre avec Houphouët-Boigny.
Lorsque l’on sait qu’en Afrique, les tenants du pouvoir se battent toujours pour leur maintien, l’écrivain, en raison de son pouvoir de mobilisation et de son prestige, passe pour être un adversaire redoutable voire un ennemi.
Certains princes, qui ont conscience du risque qu’ils courent en martyrisant leurs artistes, optent pour la ruse. Ils s’entourent d’écrivains et de penseurs et s’affichent comme des hommes de culture. Le plus souvent nos littérateurs se laissent, avec une certaine complaisance, entrainer. Il y eut des époques où chaque roi avait dans sa cour un poète, un philosophe. En Afrique, pour ne pas attirer leurs regards fouineurs, on les coopte simplement pour faire d’eux ministres ou  les intégrer dans les cabinets, ou bien les nommer à des postes juteux dans l’administration.
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Mais, faut-il pour ces raisons que l’écrivain se détourne de sa fonction sociale et regarde le pouvoir politique écraser le peuple ? Au nom de l’instinct de survie, le créateur  ivoirien doit-il se muer en zélateur et en adulateur pour jouir des largesses corruptrices du régime au pouvoir ?  La réponse est non. « La politique nous concerne tous, et nous serons des lâches si nous cédons à cette facilité : celle du détachement » écrivait François Mauriac pendant l’Occupation.
L’écrivain n’a pas le choix que de se mettre du côté du peuple opprimé. En Afrique, l’art pour l’art n’a pas de sens. Sans sacrifier la forme, qui est la substance vitale de l’œuvre d’art, l’écrivain africain a le devoir de se dresser contre l’oppression. Il doit éclairer le peuple en jetant la lumière sur les zones d’ombres de la gestion politique. Le pouvoir, même s’il est détenu par son parti ou par ses amis et parents, doit être considéré comme « un adversaire ». Je veux dire qu’il doit être un opposant dans l’âme. Il doit surveiller ce pouvoir, jouer un rôle de sentinelle en dénonçant les dérives. C’est sa mission, c’est sa vocation. Toute autre justification n’est que fuite, esquive et démission.
En Côte d’Ivoire, c’est ce rôle qu’ont joué Tiburce Koffi et Venance Konan, avec une outrance irrévérencieuse au moment où Laurent Gbagbo était président de la république. Au-delà des excès dont ils ont fait preuve, ils sont restés dans leur fonction qui est de dénoncer, qui est de servir de contre-pouvoir au régime qui tient les rênes du pouvoir. Aujourd’hui, le pouvoir qu’ils ont combattu a chuté. Un autre régime a pris place au palais. Faut-il pour autant se taire ? Tiburce Koffi est DG de l’ISAAC, Venance Konan est devenu DG de Fraternité-Matin. Vont-ils continuer à faire couler l’encre pour « ébranler » le pouvoir de leur bienfaiteur ? L’exercice semble périlleux…
Nommés à  des postes importants, la tentation d’être aphones ou flagorneurs du nouveau prince est grande chez nos écrivains. Tous les actes que pose le chef d’Etat arrachent aux plumes des écrivains proches du pouvoir des ovations nourries.  Voilà comment l’écrivain perd sa crédibilité. L’on répondra que les choses ont toujours été ainsi. Et ils ont raison. Mais justement c’est ce que nous sommes entrain de dénoncer. Quelque soit le pouvoir, l’écrivain doit garder son indépendance et tomber en transe chaque fois que la lumière de la vie est privée ou confisquée.
Est-ce la posture de nos démiurges aujourd’hui ? Pour le moment, leur silence devant le massacre des valeurs démocratiques et républicaines est simplement assourdissant.

Macaire Etty

Paru dans Le Filament N°19

Le 11 février 1990, Nelson Mandela a été libéré

C’est ce jour-là, le 11 février 1990, que Nelson Mandela a été libéré, et est sorti de prison.

En effet,  ce jour-là, le 11 février 1990, le plus célèbre prisonnier politique du XXème siècle, le futur président de l’ANC (Congrès national africain) et du pays, dont toute image avait été volontairement cachée par le régime de l’apartheid pendant 27 ans, a franchi les portes de la prison Victor Verster, près du Cap.
Ce jour-là, le 11 février 1990, est une journée historique dont le souvenir est ancré  dans la mémoire non seulement des Sud-Africains, mais de tous les Africains et de tous les êtres humains.
Le 11 février 1990, demeure et demeurera  une journée inscrite à jamais dans la mémoire collective de la nation arc-en-ciel et du monde enter.
Zenariah Barendse rappelle que, pendant les quelques semaines qui ont précédé ce jour de libération, «L’atmosphère bruissait de rumeurs, on ne parlait que de ça dans les réunions politiques comme dans les fêtes ». 
Chargé de couvrir l’événement pour l’agence Reuters, le photographe Graeme Williams se souvient, certes avec émotion, du matin du 11 février et raconte : «Nous sommes arrivés au lever du soleil. La foule était déjà compacte devant l’entrée du pénitencier. Il y avait des dizaines de photographes, mais aussi beaucoup d’ouvriers agricoles des environs, en habit de travail. Des policiers blancs formaient un cordon de sécurité, et trois hélicoptères tournaient en permanence au-dessus de nos têtes. Nous avions passé des heures à attendre sous le soleil. La tension était quasi insoutenable. Je devais à tout prix réussir cette photo. Une voiture est soudain apparue de l’autre côté de la grille, et Mandela en est sorti sous les éclairs des flashes. Enfin apparaissait cet homme qui, jusqu’alors, n’existait que dans nos têtes. Il a fait environ huit pas avant d’être poussé dans la voiture pour échapper à la foule ».
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Huit pas seulement pour Mandela, mais un bond aussi important pour l’Afrique du Sud que celui de Neil Amstrong sur la Lune quelques 20 ans plus tôt. Un moment historique, saisi dans une photo désormais mythique représentant cet homme de 71 ans, digne et droit, franchissant l’enceinte de la prison, sa main gauche dans celle de sa femme Winnie et son poing droit levé  en signe de victoire.

Le convoi prend ensuite la direction du Cap. Williams Graeme se trouvait dans le cortège raconte : «Le long des routes, sur les ponts, une foule immense réunissant des Blancs et des Noirs était venue le saluer ».
Quelques heures plus tard, Nelson Mandela prononçait son premier discours au balcon de l’Hôtel de Ville du Cap devant plus de 50.000 personnes dont Zenariah. Voici son témoignage : «Dès que la libération a été annoncée à la télévision, j’ai accouru vers l’Hôtel de Ville avec mon bébé de 4 mois dans les bras ».
Peter Prince, lui, a conduit 24 heures depuis la ville namibienne de Walvis Bay pour écouter la première allocution de Mandela : «L’ambiance était extraordinaire. J’avais l’impression de fêter le même jour mon anniversaire et mon mariage ! Même si Mandela n’était qu’une petite silhouette sur le podium, je pouvais sentir sa présence ».
Le photographe de l’agence Reuters se rendra ensuite sur la place de l’Hôtel de Ville, où  des troubles ont éclaté à quelques centaines de mètres du podium entre des militants de l’ANC et la police : « Cette violence était très choquante, après l’euphorie du matin, mais elle était le reflet des années tourmentées qui allaient suivre avant les premières élections démocratiques de 1994. Au début, nous pensions que dès que Mandela serait sorti de prison, tout irait bien. Mais, les choses se sont avérées bien plus compliquées ».
Vingt ans plus tard, Mandela a été élevé au rang d’icône nationale, et il a toujours été l’objet de nombreuses marques et célébrations…

Clémence Petit-Perrot 

lundi 5 mars 2012

Inspiration Blessée

De ma chambre me parle la nature
Dehors se lamente un vent grognon
Le soleil triste a fermé l’œil
Des nuages en tenues grises tels des veuves
S’entassent là-haut
Pleuvra-t-il ?

Le robinet du ciel est muet
Les herbes les têtes levées attendent
attendent...
que tombent les larmes célestes.

Ô Tristesse ! Ô stérilité
Ma plume a perdu sa verve
Une page blanche attend de moi
Le geste qui déflore !

Dans ma tête aucune lueur
Ma main frustrée tremble de peur
Où sont-ils passés tous ces mots frivoles
Qui me blessaient la tête
Qui me couraient après

Vide est ma mémoire
Je comprends les pleurs
De tous ces ventres inféconds. 

Macaire Etty


Paru dans le Filament N°19

Alassane Ouattara : Un ethnocentrisme qui n’a rien à envier au nazisme

Répondant aux griefs ethnocentriques reprochés à son régime, le président Alassane Ouattara a fait la déclaration suivante : « Il s’agit d’un simple rattrapage. Sous Gbagbo, les communautés du Nord, soit 40% de la population était exclue des postes de responsabilité… ». 

Sans entrer dans la véracité de ses propos, on ne peut pas s’empêcher d’avoir honte d’être le sujet d’un dirigeant aux propos aussi controversants. Ce Monsieur avait dit, dans les mêmes circonstances, que c’est parce qu’il est nordiste qu’on ne voulait pas qu’il soit candidat. Cela nous a coûté plus de 20 ans d’instabilité. Parce que les gens du nord se sont effectivement mis dans la tête qu’ils étaient exclus. Nous avions pensé à la boutade d’un homme aveuglé  par une ambition démesurée. Nous étions loin de croire que cela était l’expression d’un calcul minutieux pour l’application d’une politique ethniciste qui n’aura rien à envier au nazisme. 

L’idéologie nazie n’était rien d’autre que la promotion d’une race sur les autres. Ce que cette idéologie, tirée des tréfonds des théories sur la supériorité  de la race aryenne, a produit en Europe est encore vivace dans la mémoire collective de notre humanité. C’est pour tourner le dos définitivement aux affres de la barbarie hitlérienne qu’il est recommandé  de défendre, en priorité, les valeurs universelles d’humanité  avant celles très basses de la race et de l’ethnie. C’est au nom de ces valeurs qui révèlent la profondeur des grands hommes qu’on a combattu le colonialisme, le nazisme, l’apartheid et toutes les formes d’impérialisme. Et, c’est pour ne plus regarder dans le rétroviseur de notre bestialité que partout dans le monde, les organes de régulations de la presse traquent tous les propos à  caractère raciste et ethnocentrique.
Sans entrer dans la véracité de ce que Dramane Ouattara dit, et qu’aucun responsable politique n’a jamais dit en Cote d’Ivoire, je voudrais savoir de quel droit les gens du nord devraient représentés à plus de 40% dans l’administration d’un Etat qui compte 60 ethnies ? Où  serait aujourd’hui la Côte d’ivoire ou bien où allons-nous si chaque leader politique devrait faire du rééquilibrage ou du rattrapage en fonction de son ethnie ? Et puis, quand le premier responsable d’un Etat ouvre ainsi clairement le débat sur les clivages ethniques, peut-on encore reprocher à sa population de s’y engouffrer ?...
 
Joseph Marat
Source: topblogjosephmarat

La tête ne sert pas seulement à porter les cheveux, mais aussi et surtout à réfléchir…

Tout le monde le sait, le meeting du Front Populaire Ivoirien (FPI) qui a eu lieu, le samedi 21 janvier 2012, à la place Ficgayo, à Yopougon a été  perturbé et n’a pu aller à son terme. L’interruption brusque est le fait de violentes attaques perpétrées contre les militants du FPI qui entendaient marquer, en fanfare, leur retour dans la vie politique ivoirienne, en tant que leader de l'opposition.
En effet, la fête avait à peine commencé que des jets de pierres mêlés  à des gaz lacrymogènes sont venus perturber le meeting. Selon toute vraisemblance, il s’agissait précisément de gros cailloux lancés par de jeunes militants du RDR, le parti du président Alassane Ouattara, venus intimider ceux qui soutiennent Laurent Gbagbo. Ces agresseurs, des individus se réclamant d’Alassane Ouattara et du Rassemblement des républicains (RDR), sont parvenus à faire fuir la foule, affolée par ces pierres qui s'écrasaient jusque sur le podium.
Cette attaque qui a fait des morts et des blessés soulève une multitude de questions que beaucoup de personnes se posent. C’est pourquoi, comme à mon habitude, je vais me permettre de poser ces questions et dire ce que je pense.
La première interrogation porte sur l’opportunité et le bien-fondé de cette manifestation : sachant que le pays vit dans l’insécurité totale, vu que beaucoup de jeunes ont déjà été tués précédemment dans de telles manifestations, y compris dans le bouclier humain, était-il vraiment nécessaire et utile d’organiser ce meeting ?
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La deuxième interrogation porte sur les conditions d’organisation : étant donné que M. Ahmadou Soumahoro, secrétaire général du RDR, au lendemain du premier meeting du FPI à Koumassi le 4 septembre 2011, avait déclaré publiquement son désir d`empêcher par tous les moyens les meetings de l`opposition qu`il a qualifiés d`insurrectionnels et d`arrogants, étant donné que le RDR reproche au FPI d’avoir refusé de "saisir la main tendue par le pouvoir", étant donné que le ministre de l'Intérieur, M. Hamed Bakayoko n’avait donné son accord pour la tenue de ce meeting que, après plusieurs négociations et tergiversations, avait-on pris toutes les mesures et toutes les dispositions utiles pour parer à toutes éventualités, du moins pour ne pas tomber dans le piège du pouvoir ?
La troisième question concerne le cadre choisi pour ce meeting : Comment, pour une rencontre d’une telle envergure et d’un tel enjeu, s’est-on limité à un espace ouvert à tous les dangers, au lieu d’un stade ou autre terrain clôturé ? La place Ficgayo est un espace grandement ouvert où l’on célèbre généralement des funérailles et des bals populaires ; c’est un espace qui, au contraire d’un stade ou d’une salle de cinéma, n’offre aucune garantie de sécurité. A-t-on eu idée et conscience de livrer les militants et sympathisants du FPI, en bétail, pieds et poings liés, à la hargne et à la folie meurtrière des forcenés du RDR ? S’est-on imaginé un seul instant que le pire aurait pu survenir, comme par exemple l’élimination physique des dirigeants du FPI ? Et là, nous n’aurions eu que nos yeux pour pleurer.   Là -dessus, il faut saluer l’attitude responsable du PDCI qui, cette fois-ci, ne s’est pas allié au RDR dans cette manœuvre diabolique mettant en mal les principes démocratiques et confirmant, une fois de plus, la nature tyrannique du régime d’Alassane Ouattara. Cette attitude de retrait du PDCI montre-t-elle que les dirigeants de ce parti ont compris qu’il est irraisonné et dangereux d’accompagner le diable qui prend le parti de détruire nos propres parents et de brader nos ressources et la terre de nos ancêtres ?  Les dirigeants du PDCI ont-il enfin jeté le voile qui couvrait leurs yeux, en ce qui concerne les motifs et les mobiles  qui sous-tendent leur accointance avec le RDR, dans le cadre du RHDP mis en place par M. Alassane Ouattara pour parvenir à ses fins...
De tout ce qui précède, il ressort que, désormais, nous devons savoir raison garder, dépassionner le débat. Nous devons éviter les positions de courte vue. Nous devons nous comporter en êtres intelligents et pensants.  Nous devons éviter de traiter les militants en « bêtes à visage humain » et les mener à l'abattoir inutilement, je veux dire : pour rien. A quoi a servi et devait servir le meeting de Yopougon, très franchement? A-t-on imaginé ce qu’aurait pu arriver si les militants du FPI étaient déterminés et suffisamment armés  pour la riposte à cette agression?
Dieu nous a  donné  notre tête, pas seulement pour porter les cheveux, mais aussi pour réfléchir. Or, nous utilisons très peu notre tête pour cette deuxième fonction, hélas! C'est le malheur de l'Afrique. Comment organiser un meeting sur un terrain à ciel ouvert alors tout le monde sait qu'il y a l'insécurité? Comment les dirigeants du FPI peuvent-ils nous convaincre qu’on ne pouvait pas se passer de ce meeting? Et qu’avons-nous obtenu de ce meeting, si ce n’est des morts et des familles endeuillées, des handicapés à vie et que sais-je encore. C’est tout simplement malheureux !
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Avant d'accuser le RDR, accusons-nous nous-mêmes d'abord, ayons le courage de faire notre auto-critique et notre mea culpa, reconnaissons nos égarements et dérèglements de cette espèce, lesquels nous ont menés là où nous sommes aujourd'hui, y compris avec des milliers de morts, des leaders en exil et en prison, un régime anti-démocratique, etc.  C'est là  que je suis d'accord avec Mme Danièle Claverie : changeons de manière d'être et de faire la politique.
Quoiqu'il m’en coûte, c’est ce que je pense...

Léandre Sahiri

Paru dans Le Filament N°19

dimanche 4 mars 2012

Mettre un terme à la « solution »

« Que Monsieur ADO sache qu’on ne prend pas un peuple comme on va prendre une prostituée ». Venance Konan
 
Un nouvel Etat nazi est-il né ? Cette fois-ci, l’Europe est épargnée, car, c’est en Afrique que le nazisme hitlérien renaît de ses cendres. Le triste passé de notre humanité semble se conjuguer avec le présent.
En effet, Alassane Dramane Ouattara et ses rebelles, le sang des innocents ivoiriens versé, pour aucune cause valable fait craindre le pire. Le sol ivoirien a été  souillé depuis qu’il y a mis les pieds.
Si vous observez bien Ado et son régime et si votre regard est suffisamment critique, vous constaterez que nous avons à faire à un régime Nazi et non dictatorial (la différence est de taille !).

Un régime Nazi est né 

Voici les caractéristiques du nazisme : la hiérarchisation de la population, la catégorisation de la population, la détestation d’une partie de la population, la violence et les assassinats comme réponse politique. Il est aussi indispensable de savoir comment ils ont pris le pouvoir, quelles stratégies ils affectionnent, et quelles sont leurs méthodes de propagande.
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Hitler et les nazis étaient membres d'une société secrète qu'on peut qualifier de luciférienne, la Société de Thulé (qui se rattache à la "Fraternité de la mort", tout comme les Skull and Bones). Alassane Dramane Ouattara et ses proches collaborateurs sont eux aussi membres de la très sanguinaire loge maçonnique africaine.

Dans les régimes fascistes, le mensonge est érigé en méthode de gouvernement. Ecoutez Hitler et soyez attentif aux discours du président. Blanc bonnet, bonnet blanc. Un autre principe de la propagande fasciste du régime d’Ado est l'inversion de la réalité. Comme par exemple présenter la guerre de la France en Côte d’Ivoire comme « la libération du peuple ivoirien », ou bien affirmer que « la rébellion armée » conduite par Soro guillaume n’a commis aucune exaction. Tout cela fait partie de la stratégie qui consiste à organiser des crimes pour en accuser ses adversaires et justifier leur élimination. Comme par exemple les tueries de Duékoué en 2011 perpétré par les rebelles pro-Ouattara et attribuées à des « mercenaires » pro-Gbagbo.

Une autre caractéristique du fascisme et plus particulièrement du nazisme du régime d’Ado est la fanatisation de la population en attisant la haine contre les militants ou sympathisants du camp opposé dont les représentants sont devenus des boucs émissaires et la cible d'une violence encouragée et légitimée par le nouveau pouvoir. La haine en l’encontre de Laurent Gbagbo et les militants de LMP est depuis longtemps ce qui réunit le RHDP et les rebelles. Rappelons que pendant la crise post électorale, ce sont des cadres du RHDP qui encourageaient les rebelles-dozos à  aller jusqu'au bout dans la « solution… finale ». 

Ado fait régner une terreur sur les militants LMP pour les impressionner, les intimider et les éliminer. Il laisse donc prospérer sa Gestapo locale dite FRCI.
Dans cette Côte d’Ivoire de 2011, le nazisme d’Ado fait exécuter ou déporter ses opposants dans des camps de concentration de Korhogo, de Bouna, de Boundiali, etc., mène la persécution contre n’importe lequel des militants LMP. Ceux-ci sont presqu’exclus de la nouvelle société ivoirienne mise en place par Ado, avec le même modus opérandis, la même violence, les mêmes agissements, la même arrogance, et un tribalisme exacerbé.

Entre terrorisme, promptitude et amnésie.
Voici une cohorte de criminels de guerre jamais inquiétés, leurs crimes contre l’humanité  perpétrés au su et au vu de tous, une arrogance affichée, avec en clé, une  surprotection dont il bénéficie de la France et de l’ONUCI. Les crimes commis par Ado et ses rebelles depuis 2002 font de lui le chantre de l’horreur absolue, l’homme le plus monstrueux que l’Histoire de la Côte d’Ivoire ait connue...
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Aujourd’hui, au nom de quel principe la France fait-elle inculper Laurent Gbagbo et laisse Ado et ses rebelles sanguinaires ? A quoi rime ce théâtre où  seul, se joue une même rengaine, la symphonie de «la justice des vainqueurs»  ?
Avant que le pire n’émerge et rende nos discours, nos idées, nos réflexions dérisoires et caduques au profit d’un embrasement généralisé de la Côte d’Ivoire…, il conviendrait d’imposer à Ouattara, responsable de «  crimes de guerre», la condamnation claire et sans équivoque qu’il mérite. Ainsi, on pourra mettre un terme à la «Solution»  qu’il croit incarner.  

Nikitta Kadjoume

La politique et le savoir

Il est aujourd’hui triste, très triste, de constater et d’entendre dire, dans les milieux politiques, que le savoir n’est pas important. Les sociétés secrètes deviennent, de plus en plus, la nouvelle donne qui ouvre les portes du pouvoir, du bonheur et de l’existence elle-même. Des aspirants politiques, nés de la dernière lune, refusent, de la manière la plus paradoxale et en public, de reconnaître la place prépondérante qu’occupe ‘le sachant’ dans la vie d’une nation.

Que cache l’attitude de nombreux néo-politiciens qui sont réfractaires au savoir ? Et, en quoi une telle vision représente un danger ?

Qu’est-ce que le savoir ?

Le mot savoir provient du latin ‘sapere’, qui signifie : posséder de la saveur, goûter, connaître. Avec l’évolution du temps, le mot savoir, après avoir transité par une forme figurée, a pris le sens actuel et désigne un ensemble de connaissances ou d'aptitudes reproductibles et transmissibles, acquises par l'étude, l'observation, l'apprentissage et/ou par l'expérience. Le savoir désigne également l’état d’une personne qui, en quelque sorte, est « informée » ou qui a la « tête bien pleine » et la « tête bien faite ».

De même, le savoir se rend plus visible et pratique sous le nom de « savoir-faire », « savoir-vivre », etc. C’est en ce sens qu’on appelle « intellectuel » celui dont le savoir repose sur l'appropriation effective des connaissances ou la création de concepts, en parallèle avec le développement des savoirs des sciences et de la philosophie. Par ailleurs, la notion de «savoir être», utilisée notamment dans le champ de la formation des adultes, renvoie aux attitudes et comportements qu'un sujet met en œuvre pour s'adapter à un milieu.

Le savoir est une ressource indispensable et utile à tout être humain

Le savoir est une ressource de nature immatérielle indispensable à tout être humain et utile pour l'action, la performance, la réussite : « Savoir, c'est pouvoir ! ». C’est en cela que le savoir constitue une valeur ajoutée, en rapport avec l'expérience vécue, l’environnement, les intérêts et les besoins. Cette valeur ajoutée prend l'allure d'un bien et même d'un « bien social et économique », en plus de sa dimension psychologique.

L’acquisition du savoir suppose un processus continu d’apprentissage, d’études, d'assimilation et d'organisation des connaissances par soi-même ou dans les structures et des institutions mises en place par les communautés humaines, telles que la famille, l’école, etc.

Dans ces structures et institutions, l'éducation a pour mission d'aider à l'acquisition et à l'appropriation du savoir, à la socialisation de l’individu ; l'enseignement a pour but de compléter l'acquisition de connaissances et le savoir-faire, pendant que la formation professionnelle est chargée de la transmission des savoirs professionnels. Quant à la pédagogie, elle élabore les conditions de cette transmission.

Selon les époques et les cultures, la conservation du savoir et la transmission des connaissances s'appuient sur la communication orale et l'expression écrite. Des « entrepôts du savoir » sont créés et entretenus comme mémoire collective. Ce sont : les « forêts sacrées », les temples, les sanctuaires, les bibliothèques, les centres de documentation, etc.

Le savoir et la politique

Dans l’ancienne Grèce et chez les Romains par exemple, ne faisait pas de la politique qui voulait.

Certes, l’âge était pour beaucoup dans la sélection des représentants de la nation ; mais, le savoir occupait une place si importante qu’il n’était pas permis à tous les hommes, même d’un âge avancé, de faire de la politique sans un minimum de savoir. Cela veut dire qu’on pouvait être d’un certain âge, respectable, sans toutefois prétendre à un poste politique, si le minimum de connaissances (littéraires, guerrières, historiques, scientifiques et autres) n’était pas acquis.

Cette vision qui demande au dirigeant le minimum de savoir devrait être en vigueur en Afrique et sur d’autres continents du tiers-monde.

Malheureusement, alors que le savoir occupe une place prépondérante pour faire de la politique, beaucoup d’Africains refusent d’apprendre. Ils arguent que l’on n’a pas besoin d’être bardé de connaissances, ni de diplômes, pour diriger une nation ou une grande compagnie, etc. Ainsi, la nouvelle classe des politiques africains regorge de gens qui rejettent systématiquement le savoir ou refusent d’étudier, mais qui ont recours au fétichisme, aux sociétés secrètes et/ou aux armes pour arriver au pouvoir.

En Côte d’Ivoire, avec le canon à la main comme dans un film ‘Western’, Soro Guillaume est devenu Premier Ministre, sans avoir terminé ses études et sans avoir auparavant exercé une quelconque fonction. Ailleurs, Joseph Kabila est devenu le chef d’Etat en utilisant les mêmes méthodes et en s’attachant les amitiés des francs-maçons, des rosicruciens et autres sociétés secrètes qui détruisent l’Afrique pour le compte de l’Occident. Aux Etats-Unis, M. George W. Bush est devenu président de la république avec les connections de son père qui fut, lui-même, président.

Cependant, il est à noter que tous ces parvenus n’ont pas changé leur histoire personnelle, ni celle des nations qu’ils dirigent ou ont dirigée. Entre autres, M. George W. Bush qui, comme on le sait, fut traité pour alcoolisme et pour autre comportement antisocial, fut un piètre président...

Toute personne qui ne respecte pas le savoir et qui contraint les masses à se détourner du savoir, est un ennemi de la liberté individuelle et publique.

Il est temps, vraiment temps que les politiques, et singulièrement les politiques africains, cessent d’endormir les masses. Il faut qu’ils encouragent les jeunes (et même les vieux qui le désirent encore), à aller à l’école, à apprendre, à accéder aux structures indiquées pour l'acquisition et l'appropriation du savoir. C’est en procédant ainsi que les Africains réussiront à réduire et à éradiquer l’ignorance, la misère et les souffrances et sortiront de l’état dans lequel ils sont maintenus depuis des siècles par l’Occident.

Voilà pourquoi nous estimons que M. Alassane Ouattara qui a fermé les universités en Côte d’ivoire est le premier ennemi de notre pays. Avec les armes, les occidentaux et leurs alliés kidnappent, tuent, violent des Africains et exploitent les richesses de l’Afrique sans souci et sans vergogne. Dans ces conditions, pour les Africains qui sont militairement faibles, le savoir constitue la meilleure arme de défense. Formons-nous en ayant en tête l’indépendance de l’Afrique. Sans information, sans formation, sans culture politique, sans échanges, l’Africain sera annihilé par les forces brutales qui ne connaissent ni loi, ni humanisme. Il ne faut pas perdre de vue que les lois des Occidentaux changent selon leurs intérêts du moment et selon la couleur de la personne qui discute avec eux. Retenons cela et formons-nous dans ce sens, si nous tenons à vivre et à nous libérer du joug de l’occident et de certains Africains qui sont les pires ennemis de l’Afrique.

Accéder au savoir pour constituer une force de libération pour l’Afrique

C’est grâce au savoir que l’occident se positionne en norme universelle. Combien de fois n’avons-nous pas été amenés à haïr nos cultures au profit de celles venues du Nord ?...

Il faut que nous nous réveillions. Il faut que chacun de nous joue son rôle. Que chacun, chaque soir, fasse le bilan des pas posés pour libérer l’Afrique. Que chaque africain œuvre à réduire les heurts entre nous, à annihiler les conflits qui constituent une véritable plaie et la fissure par laquelle l’Occident infiltre nos rangs facilement pour nous détruire.

Le savoir est un outil. Instruisons-nous pour nous approprier cet outil pour libérer l’Afrique.

Le savoir est une arme, profitons-en. Ceci est tellement vrai que Bergson dit du savoir : « Savoir, c’est prévoir pour agir »1.

Le savoir donne également une satisfaction personnelle et permet à celui qui le possède de devenir l’éclaireur qui sort son peuple des pénombres de l’ignorance qui l’exposait à tout danger.

Le savoir est une force, instruisons-nous pour ne pas demeurer à vie nos propres « égorgeurs »2 et de mauvais enfants pour l’Afrique.

Sylvain De Bogou

Paru dans Le Filament N°19
 

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