lundi 5 mars 2012

La tête ne sert pas seulement à porter les cheveux, mais aussi et surtout à réfléchir…

Tout le monde le sait, le meeting du Front Populaire Ivoirien (FPI) qui a eu lieu, le samedi 21 janvier 2012, à la place Ficgayo, à Yopougon a été  perturbé et n’a pu aller à son terme. L’interruption brusque est le fait de violentes attaques perpétrées contre les militants du FPI qui entendaient marquer, en fanfare, leur retour dans la vie politique ivoirienne, en tant que leader de l'opposition.
En effet, la fête avait à peine commencé que des jets de pierres mêlés  à des gaz lacrymogènes sont venus perturber le meeting. Selon toute vraisemblance, il s’agissait précisément de gros cailloux lancés par de jeunes militants du RDR, le parti du président Alassane Ouattara, venus intimider ceux qui soutiennent Laurent Gbagbo. Ces agresseurs, des individus se réclamant d’Alassane Ouattara et du Rassemblement des républicains (RDR), sont parvenus à faire fuir la foule, affolée par ces pierres qui s'écrasaient jusque sur le podium.
Cette attaque qui a fait des morts et des blessés soulève une multitude de questions que beaucoup de personnes se posent. C’est pourquoi, comme à mon habitude, je vais me permettre de poser ces questions et dire ce que je pense.
La première interrogation porte sur l’opportunité et le bien-fondé de cette manifestation : sachant que le pays vit dans l’insécurité totale, vu que beaucoup de jeunes ont déjà été tués précédemment dans de telles manifestations, y compris dans le bouclier humain, était-il vraiment nécessaire et utile d’organiser ce meeting ?
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La deuxième interrogation porte sur les conditions d’organisation : étant donné que M. Ahmadou Soumahoro, secrétaire général du RDR, au lendemain du premier meeting du FPI à Koumassi le 4 septembre 2011, avait déclaré publiquement son désir d`empêcher par tous les moyens les meetings de l`opposition qu`il a qualifiés d`insurrectionnels et d`arrogants, étant donné que le RDR reproche au FPI d’avoir refusé de "saisir la main tendue par le pouvoir", étant donné que le ministre de l'Intérieur, M. Hamed Bakayoko n’avait donné son accord pour la tenue de ce meeting que, après plusieurs négociations et tergiversations, avait-on pris toutes les mesures et toutes les dispositions utiles pour parer à toutes éventualités, du moins pour ne pas tomber dans le piège du pouvoir ?
La troisième question concerne le cadre choisi pour ce meeting : Comment, pour une rencontre d’une telle envergure et d’un tel enjeu, s’est-on limité à un espace ouvert à tous les dangers, au lieu d’un stade ou autre terrain clôturé ? La place Ficgayo est un espace grandement ouvert où l’on célèbre généralement des funérailles et des bals populaires ; c’est un espace qui, au contraire d’un stade ou d’une salle de cinéma, n’offre aucune garantie de sécurité. A-t-on eu idée et conscience de livrer les militants et sympathisants du FPI, en bétail, pieds et poings liés, à la hargne et à la folie meurtrière des forcenés du RDR ? S’est-on imaginé un seul instant que le pire aurait pu survenir, comme par exemple l’élimination physique des dirigeants du FPI ? Et là, nous n’aurions eu que nos yeux pour pleurer.   Là -dessus, il faut saluer l’attitude responsable du PDCI qui, cette fois-ci, ne s’est pas allié au RDR dans cette manœuvre diabolique mettant en mal les principes démocratiques et confirmant, une fois de plus, la nature tyrannique du régime d’Alassane Ouattara. Cette attitude de retrait du PDCI montre-t-elle que les dirigeants de ce parti ont compris qu’il est irraisonné et dangereux d’accompagner le diable qui prend le parti de détruire nos propres parents et de brader nos ressources et la terre de nos ancêtres ?  Les dirigeants du PDCI ont-il enfin jeté le voile qui couvrait leurs yeux, en ce qui concerne les motifs et les mobiles  qui sous-tendent leur accointance avec le RDR, dans le cadre du RHDP mis en place par M. Alassane Ouattara pour parvenir à ses fins...
De tout ce qui précède, il ressort que, désormais, nous devons savoir raison garder, dépassionner le débat. Nous devons éviter les positions de courte vue. Nous devons nous comporter en êtres intelligents et pensants.  Nous devons éviter de traiter les militants en « bêtes à visage humain » et les mener à l'abattoir inutilement, je veux dire : pour rien. A quoi a servi et devait servir le meeting de Yopougon, très franchement? A-t-on imaginé ce qu’aurait pu arriver si les militants du FPI étaient déterminés et suffisamment armés  pour la riposte à cette agression?
Dieu nous a  donné  notre tête, pas seulement pour porter les cheveux, mais aussi pour réfléchir. Or, nous utilisons très peu notre tête pour cette deuxième fonction, hélas! C'est le malheur de l'Afrique. Comment organiser un meeting sur un terrain à ciel ouvert alors tout le monde sait qu'il y a l'insécurité? Comment les dirigeants du FPI peuvent-ils nous convaincre qu’on ne pouvait pas se passer de ce meeting? Et qu’avons-nous obtenu de ce meeting, si ce n’est des morts et des familles endeuillées, des handicapés à vie et que sais-je encore. C’est tout simplement malheureux !
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Avant d'accuser le RDR, accusons-nous nous-mêmes d'abord, ayons le courage de faire notre auto-critique et notre mea culpa, reconnaissons nos égarements et dérèglements de cette espèce, lesquels nous ont menés là où nous sommes aujourd'hui, y compris avec des milliers de morts, des leaders en exil et en prison, un régime anti-démocratique, etc.  C'est là  que je suis d'accord avec Mme Danièle Claverie : changeons de manière d'être et de faire la politique.
Quoiqu'il m’en coûte, c’est ce que je pense...

Léandre Sahiri

Paru dans Le Filament N°19

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