mardi 25 mai 2010

De l'intérêt Général

Quand on regarde la Côte d’Ivoire d’aujourd’hui et le comportement de sa population, on est forcé de reconnaître que l’un des grands problèmes qui se posent à nous, c’est notre égoïsme. Rien ne doit profiter à personne, si ça ne nous profite pas en particulier, telle est la devise. Si bien que personne ne se soucie de l’intérêt général, de l’intérêt de la Nation. Ce qui compte, c’est soi. Et, si cette crise de laquelle nous peinons à sortir perdure, c’est bien parce que, tous, nous posons des actes dans le seul souci à chacun de se satisfaire soi-même.

Et pourtant, partout où il y a un souffle de vie, s’observe un principe selon lequel chacun des éléments d’un groupe doit contribuer à la vie et à la prospérité du groupe tout entier. Car, les différents éléments sont complémentaires, interdépendants. Et chaque élément bénéficie de la participation des autres. D’où, le concept de l’intérêt général ou de la « communauté d’intérêt ».

Prenons l’exemple de l’organisme humain. Si ses différents organes fonctionnent de manière anarchique et individuelle ou singulière, au lieu de se compléter dans une logique de l’intérêt général, l’organisme, à coup sûr, ne survivra pas. Il serait privé de cohésion. Le cancer le démontre assez bien. Il s’agit d’une cellule qui se multiplie anarchiquement, ne se souciant que de son intérêt. Au bout d’un certain temps, il (le cancer) va se généraliser, c'est-à-dire occuper tout seul tout l’organisme, et enfin de compte, mourir avec l’organisme qu’il a détruit. En privilégiant, égoïstement, son intérêt, en s’opposant à l’esprit de l’intérêt commun, il (le cancer) a provoqué son autodestruction.
Autre exemple. Si nous considérons la vie d’une plante, on remarquera qu’il y a certains éléments qui vont capter l’énergie solaire, d’autres vont puiser l’eau et les aliments nutritifs : chacun de ces éléments participe à la vie et à la prospérité de la plante dans son ensemble. Il y a une organisation conçue pour coordonner les intérêts particuliers dans une logique d’intérêt commun. Aucune des parties, notamment des racines aux feuilles, n’est exclue des «bénéfices» engendrés par le «travail» de chacun. Cette organisation est, par sa nature, non-discriminatoire. Chacune des parties a donc intérêt à ne pas perdre de vue l’intérêt général, en vue de favoriser, sauvegarder le fonctionnement harmonieux du groupe.
Pour reprendre l’exemple de la plante, supposons que les éléments qui la composent soient totalement indépendants les uns des autres, il se trouvera évident que chacun de ces éléments devrait assumer seul toutes les fonctions qui étaient auparavant partagées : capter l’énergie solaire, puiser les éléments nutritifs, se reproduire, etc. Ces éléments indépendants n’auraient plus aucun motif de s’associer pour former une plante, et la plante elle-même n’aurait plus de raison d’être.
En analysant cette logique, on constate, en effet, que le principe de l’intérêt général contient implicitement les notions de solidarité, d’équité, de liberté, etc. Nous sous-estimons, très souvent, les propriétés que présente cette logique de l’intérêt général. Au point qu’elle nous paraît tout simplement «normale», au même titre que l’existence de la pluie et des arbres. A force de l’avoir devant les yeux, nous n’y faisons plus vraiment attention. Pourtant, il suffit d’imaginer une société sans ordre ni loi, une société sans organisation, pour nous rendre à l’évidence des avantages extraordinaires qu’offre l’intérêt général. Celui-ci assure une plus grande efficacité, un meilleur rendement, une meilleure survie, au contraire d’une organisation qui n’est pas régie par la logique de l’intérêt général.
Lorsque, dans un milieu, un élément évolue indépendamment des autres, il cesse de se conformer à la logique de l’intérêt général. Pareil au comportement d’une cellule devenue cancéreuse et qui n’obéit plus à la logique de l’intérêt général, ayant «choisi» d’évoluer de manière individuelle, sans tenir compte de la réalité au sein du groupe.
La logique de l’intérêt général s’oppose donc au chaos. Elle en est l’antithèse. On pourrait la comparer au principe d’une chorale. En effet, dans une chorale, le maître de chœur veille à ce que chacun des choristes joue sa partition en conformité et en complémentarité avec tous les autres, même si chaque élément de l’ensemble évolue dans une voix spécifique. Les choristes n’ont même pas besoin de s’accorder entre eux. Il suffit seulement à chacun de respecter le rythme indiqué par le maître de chœur. Et sa voix se trouve alors automatiquement en symbiose avec toutes les autres. Le maître de chœur est la référence pour tous. Cette coordination des choristes, par une référence commune, fait que l’ensemble de la chorale produit une harmonie. Au lieu d’une cacophonie. Sans maître de chœur, cette harmonie serait extrêmement difficile à atteindre. Et presque impossible à faire durer. Parce qu’il n’y aurait aucun principe de stabilité pour s’opposer aux tendances cacophoniques de chacun des choristes.
De même, l’équilibre dans un pays ne résulte pas d’un hasard. Il est organisé et coordonné par des relations de cause à effet. Chaque individu ne doit pas se préoccuper que de son intérêt personnel. Tous les intérêts de tous les individus doivent être coordonnés par une logique qui doit viser à promouvoir l’Intérêt Général. Si les Ivoiriens avaient, un temps soit peu, le souci de l’intérêt du bien public, de la Nation et du devenir de notre pays, en lieu et place de leurs intérêts personnels, égoïstes, il y a longtemps qu’on serait sorti de cette crise morale, éthique, culturelle et, finalement économique et politique qui nous consume lentement mais sûrement.

Serge Grah
(Journaliste, Ambassadeur Universel pour la Paix).

Un article paru dans La chronique sous l'art à palabres du Filament N°4



1 commentaires:

Anonyme a dit…

Simple, net & précis
Merci à vous

Enregistrer un commentaire

 

Le Filament Magazine Copyright © 2011 -- Template created by O Pregador -- Powered by Blogger